Le photographe Alexandre Chevallier a été nominé à la 24ème édition de la Bourse du talent pour son travail sur "Paysage d'après-guerre : Sarajevo, février 2004". Derrière la reconstruction du centre-ville historique, les traces du siège de Sarajevo (1992-1995) se lisent toujours dans le paysage urbain. Les périphéries n'ont pas bénéficié du même effort de reconstruction, des bâtiments portent encore les stigmates des tirs d'obus et des balles qui ont menacé pendant 3 ans le quotidien des Sarajéviens. "Le siège militaire a laissé sa trace aux endroits disputés tant stratégiquement qu’"éthiquement". Dobrinja, Ilidza, Novo Grad, Novo Sarajevo, la cité olympique des jeux de 1984 sont ces lieux. Là, un espace se reconstitue. L’ancien, le détruit, le désaffecté, l’"inhabitable habité" côtoie le neuf, le "en construction" et le rénové. Après 1995, certains endroits ont pu par instant être "disputés" politiquement. Ainsi découvre-t-on un espace où construction de type socialiste se superposent aux sièges militaires, aux financements internationaux, aux initiatives locales, aux réparations familiales. Un espace, blessé, stigmatisé, en mouvement. Voué à évoluer encore. Ces images ne sont que ce qu’elles représentent, un parti-pris. Un instant de ce mouvement, 6 journées en février 2004". Derrière le regard du photographe, on découvre la réalité des populations les plus pauvres, qui vivent aujourd'hui dans des bâtiments vétustes et souffrent de la gestion du budget de la Bosnie-Herzégovine. Les accords de Dayton qui ont mis fin à la guerre ont ainsi institutionnaliser la division du pays en deux entités : la Fédération croato-bosniaque, et la Republika Srprska. A la tête de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, chaque poste est partagé par 3 personnes (un Serbe, un Bosniaque et un Croate) qui s'alternent sur le même siège. Si cette répartition tenait à la volonté de voir représentée chaque communauté dans les postes à responsabilité, elle a aussi un coût important. Pour faire simple : 3 personnes, donc 3 salaires. Et le coût de fonctionnement de ce système politique (qui s'étend également aux hauts postes à responsabilité de l'administration) pèse énormément sur le budget. De plus, la part des destructions se lit également dans l'économie du pays. Pour exemple, les forêts ont été en grande partie détruites, alors que la ressource bois constituait une part importante de l'économie de la Bosnie-Herzégovine. Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres... Les aides internationales se sont taries. Dans ce contexte, la reconstruction des périphéries de la ville de Sarajevo se fait attendre, et des bâtiments totalement détruits marquent le paysage comme des géosymboles des conséquences du siège de la ville.
Autour de la ville de Sarajevo :
- Sarajevo : de la ville multiculturelle à la ville divisée (sur les transformations de la composition et de la répartition de la population sarajévienne) sur le site "Geographie de la ville en guerre",
- Les billets du blog sur la ville de Sarajevo.
Voir également les les photographies d'Eloïse Bollack, ancienne étudiante en géographie, sur la ville de Sarajevo, qu'elle a réalisé lors de ses deux séjours de six mois à Sarajevo en 2003 et 2004 dans le cadre de sa maîtrise et de son DEA.
3 commentaires:
A consulter également l'exposition virtuelle proposée par le Conseil de l'Europe, présentant l'exposition des photographies de Louis Klipfel sur "Un regard d'espoir" (exposition à Sarajevo en 1998 sur le patrimoine culturel et urbain de Bosnie-Herzégovine).
http://www.coe.int/t/DG4/Expos/exposarajevo/indexfr.htm
A noter que le photographe se prénomme Alexandre et non Alain ...
Cette imprécision a été "réparée", merci de me l'avoir signalée !
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