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mercredi 30 septembre 2009

Cartographie et art de la guerre



Une photographie parue dans Le Figaro du 14 septembre 2009 illustrant l'article "Comment Ben Laden échappe à la CIA". Si la carte thématique peut être conçue et utilisée comme un discours dans les relations politico-identitaires, cette ancienne photographie (datant d'avril 1998) est particulièrement démonstrative de l'utilité de la cartographie dans l'art de la guerre. La parfaite connaissance du terrain est un grand avantage dans la conduite d'opérations militaires, et requiert des informations tant sur l'environnement physique (topographie, géomorphologie, hydrologie, biogéographie, climatologie...) que sur l'environnement humain (hauts-lieux de la contestation, hauts-lieux de la violence, hauts-lieux de l'insécurité, hauts-lieux de l'instabilité... le tout relié selon des réseaux multiscalaires complexes). La production de cartes thématiques reste donc une priorité tant dans la conduite de la guerre que dans les opérations de maintien ou d'imposition de la paix. Il ne s'agit pas seulement de savoir se repérer, mais également de savoir repérer les autres acteurs dans la ville. Il s'agit également d'avoir au minimum les mêmes informations que les autres acteurs, au mieux d'en disposer de plus nombreuses, et de meilleures qualités. La cartographie fait donc partie intégrante du renseignement militaire, dans la mesure où elle permet d'appréhender les lieux et les hommes dans toute intervention militaire, tout particulièrement dans le cas de guerres urbaines. A ce propos, l'historien Jean-Louis Dufour et le géographe Philippe Boulanger relèvent combien le manque de cartes ou leur ancienneté sont des désavantages qui n'ont cessé d'être décisifs dans des guerres aux modalités, aux technologies et aux enjeux différents.




Les leçons de la guerre de 1870-1871 :

"En juillet 1870, Napoléon III conduit la France dans la première guerre avec l'Allemagne depuis 1815. Malgré une structure d'organisation presque semblable, les forces sont inégales et les combats d'août-septembre 1870 aboutissent à la défaite. L'impact de cet échec conduit, d'abord, à réfléchir sur ses causes. Or l'une d'entre elles met en cause directement l'absence de connaissances générales en géographie et d'un appareil cartographique précis de la France destiné aux états-majors. Durant les différentes campagnes déroulées sur le territoire français, l'instruction géographique des officiers s'est révélée insuffisante, notamment pour exploiter certains avantages tactiques et stratégiques du terrain. La réflexion géographique, limitée pratiquement au seul ouvrage de Théophile Lavallée, dont la première édition date de 1840, n'est pas renouvelée à la veille de la guerre. L'emploi des cours d'eau, des chaînes de montagne comme la lecture des paysages dans la tactique ne sont pas véritablement approfondis alors que la géographie militaire est considérée comme un fondement de l'instruction militaire des officiers en Allemagne. La connaissance du terrain devient indispensable dans le combat à l'heure où la conduite de la guerre mplique de nouvelles technologies (l'armement et les chemins de fer) et des armées de masse.

Parallèlement, l'efficacité de la section du service géographie au dépôt de la guerre est mise en cause contrairement à celle de l'armée allemande qui dispose d'un appareil de cartographie beaucoup plus développé, de sorte qu'une meilleure connaissance du terrain joue en sa faveur. Au déclenchement de la guerre, l'armée française ne dispose d'aucun approvisionnement en cartes topographiques adaptées à ses besoins, utilisant parfois des cartes allemandes du territoires français. L'idée que la guerre pouvait se produire aussi profondément sur son propre territoire n'avait pas été jusqu'alors envisagée au point de n'avoir pas renouvelé entièrement la cartographie de l'espace national. La guerre de 1870-1871 révèle ainsi de graves conséquences. Les difficultés du commandement liées à un manque d'informations géographiques, l'inefficacité d'un service géographique dans des situations de crises conduisent à une remise en cause globale de la pensée géographique au sein de l'armée. Cet aspect de la guerre est suffisamment important pour que, plusieurs années plus tard, le romancier Emile Zola relève ces aspects majeurs. Dans La Débâcle, dix-neuvième roman de la série des Rougon-Macquart, publié en feuilleton de février à juillet 1982 dans la Vie populaire, l'écrivain relate les difficultés rencontrées par les officiers français. "Comment voulez-vous qu'on se batte dans un pays qu'on ne connaît pas" s'exclame le général Burgain-Desfeuilles, disposant de cartes de l'Allemagne, mais d'aucune de la France. Le manque de préparation est affligeant pour l'armée française, dénonce Zola, dans la retraite d'Alsace qui la conduit vers Sedan. A défaut de cartes, "il [le général] ne lui restait plus que son courage". Les leçons de la défaite contribuent de fait à valoriser la géographie militaire non sans imiter le modèle allemand qui avait conduit à la victoire."

Philippe BOULANGER, 2006, Géographie militaire, Ellipses, coll. Carrefours Les Dossiers, Paris, pp. 14-15. Voir, pour plus de détails, son ouvrage La Géographie militaire française (1871-1939), Economica, coll. Bibliothèque stratégique, Paris 620 p.




Géographie urbaine, défense et guerre

"La préparation à la guerre impose une étude détaillée et approfondie des terrains où les armées sont susceptibles de s'affronter. Cette réflexion doit s'appuyer sur une connaissance approfondie de la géographie, là où, comme le disait Napoléon, réside "la politique des Etats".

Il faut savoir apprécier les formes du terrain, les zones favorables aux attaques (plaines, vallées, espaces dégagés), celles plus propices à un combat défensif (montagnes, bocages et tout mouvement de terrain qui tranche avec la plaine alentour). L'étude de la carte permet de calculer la vitesse des déplacements en fonction certes des moyens de transport utilisés, mais aussi de la végétation, des obstacles naturels et des dénivelés. La connaissance des climats oriente l'habillement des troupes ; elle précise les limites à ne pas franchir en matière de résistance des hommes au froid, à la chaleur, à la soif ; elle indique aux responsables les périodes les plus propices aux opérations. La topographie, enfin, permet au chef d'identifier telle ou telle forme du terrain, fleuve, mammelon, agglomération. Ne pas se perdre à la guerre est une condition fondamentale du succès des armes.

Mais la géographie militaire pèche d'ordinaire par son désintérêt pour les villes. Les plans d'opération préfèrent geler, si c'est possible, la moindre agglomération, considérée depuis les temps modernes comme un sanctuaire. Les écoles militaires s'installent à la campagne. Ces établissements célèbrent dans leurs brochures l'étendue de leurs terrains, la diversité des paysages, la rusticité de leurs campagnes. Débarquant à Beyrouth, le 23 août 1982, le contingent français de la force multinationale, composé de deux régiments (1.500 hommes), est muni d'un unique plan de Beyrouth, sous forme d'une médiocre photocopie. Aujourd'hui encore, les conurbations font rarement partie des dossiers d'objectifs à établir en priorité.

Bien souvent, la guerre modèle la ville pour avoir orienté ses plans, puis ses transformations successives. En outre, pour assurer leur sécurité, les Etats ont longtemps trouvé judicieux de jalonner les itinéraires d'invasion de places fortifiées, souvent liées à l'existence de villes, plus ou moins importantes, mais dont la résistance prolongée pouvait garantir le salut de leur pays."

Jean-Louis DUFOUR, 2002, La guerre, la ville et le soldat, Odile Jacob, Paris, pp. 37-38.


Colloque "L'Enjeu Capital(es) : les Métropoles de la grande échelle"


Un colloque international d'Architecture sera organisé les 1er et 2 octobre 2009 au Centre George Pompidou (grande salle, niveau - 1), autour de quatre demi-journées thématiques : Mémoires du futur, Ecosophies de l'urbain, Perspectives morphogénétiques, et Chaos génériques. Voir le programme sur le site du colloque. Pour tous ceux qui ne pourraient s'y rendre, les organisateurs ont prévu la diffusion en direct sur Internet.


samedi 26 septembre 2009

Des blogs "hors thème"


Dans la continuité du dernier billet, voici une petite présentation de blogs qui ne traitent pas de la guerre, mais intéresseront tout passionné de géographie et plus généralement de sciences humaines.
Le blog d'Arthur Devriendt, doctorant en géographie à l'Université Paris I, présente des thèmes variés autour des technologies de l'information et de la communication (on se reportera sur ce thème aux vidéos des communications du colloque Modèles d'ici et d'ailleurs : La société de l'information en ses territoires qi s'est déroulé du 8 au 11 juin 2009 à Saint-Louis du Sénégal), aux nouvelles ruralités et aux migrations. Arthur Devriendt prépare actuellement une thèse sur le télétravail.
Baptiste Coulmont est sociologue et enseigne à l'Université de Paris 8. Son site propose une présentation de ses travaux et publications, ainsi qu'un blog. Les domaines abordés y sont assez variés, mais se concentrent principalement sur la sociologie de la sexualité et sur la religion. On trouvera également de nombreuses réflexions sur la cartographie (usages, discours...). Une approche très spatiale qui intéressera certainement les géographes !
Un site proposé par Philippe Kekourio, professeur d'histoire-géographie enseignant en BTS tourisme. La géographie du tourisme y est présentée dans ses thématiques les plus diverses (on trouve par exemple une réflexion sur les liens entre terrorisme et flux touristiques), et de nombreuses études de cas propose une analyse par zone géographique. Le site est en cours de construction, mais les pages réalisées sont déjà très nombreuses. On trouve par exemple un dictionnaire très intéressant pour sa présentation concise des concepts de la géographie.


TerrFerme
Le blog présente les travaux de recherche, les réflexions et des actualités concernant la géographie de l'enfermement. TerrFerme ("les dispositifs de l'enfermement : aproche territoriale du contrôle politique et social contemporain) est un programme Jeunes Chercheurs de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) qui réunit une équipe de 10 chercheurs spécialistes de la géographie et de la sociologie de l'enfermement (prisons, camps de réfugiés, mobilités contraintes...). Un travail des plus passionnants.


jeudi 24 septembre 2009

Des blogs en pagaille...


La liste des blogs s'est nettement élargie ces derniers temps, sans prendre le temps de présenter ainsi des blogs passionnants. Beaucoup de ces découvertes sont dues aux deux blogs Etudes géopolitiques européennes et atlantiques (Olivier Kempf) et Mon Blog défense. Qu'ils soient remerciés pour leur veille attentive ! Certains blogs sont présents dans les listes depuis un moment, d'autres plus récemment, et le temps était venu de les présenter plus convenablement.

Le site du géographe Marc Lavergne, spécialiste de ces deux régions, qui a, notamment, travaillé sur la question du Darfour (guerre, arme alimentaire, déplacés/réfugiés)... Le site propose ses principaux articles (journalistiques et universitaires), ses principales interventions radio... de Marc lavergne. On retrouve également des travaux plus récents sur la ville de Dubaï. L'auteur a conçu sa plate-forme plus comme un site que comme un blog, la mise à jour n'est donc pas régulière, mais l'ensemble donnera des informations pertinentes sur la question du Moyen-Orient et celle de la Corne de l'Afrique.

Un blog sur "le monde tel que vous ne le voyez pas". L'auteur se concentre particulièrement sur la question des conflits, leur présentation médiatique, et propose une plate-forme agréable qui permet de visionner des vidéos pertinentes. Un blog qui enrichit bien l'analyse géopolitique du monde proposée sur le web.

Dans le même esprit, on (re)découvrirale blog Géopolitique tenu par René-Eric Dagorn, professeur de géographie en classes préparatoires et enseignant à Sciences-Po. Conçu comme un complément de cours pour ses étudiants, le blog intéressera tous ceux qui s'intéressent à la géopolitique, particulièrement de le cadre du Moyen-Orient, sur la question iranienne. L'auteur s'intéresse notamment à la question du construit social et des discours comme moteurs d'une représentation du monde "formatée" (par exemple sur la question de la société du risque).

Un blog tout récent (créé le 16 août 2009), proposé par Jérémy Drisch (consultant-analyste), qui se propose d'analyser la géopolitique des frontières, tout particulièrement dans le cadre de la géopolitique de la mer et des océans (délimitation de frontières internationales et conflictualité, transports maritimes internationaux, piraterie maritime...).

La géopolitique de l'Afrique vue par une doctorante en sciences politiques, Sonia Le Gouriellec. Encore plus récent (le 21 septembre 2009), il complètera bien toutes les analyses proposées dans les différents sites sur la conflictualité africaine, par son regard de politologue. L'auteur est plus particulièrement spécialiste de la Corne de l'Afrique.

Un blog consacré à la présentation et l'analyse des guerres en cours, entre conflits très médiatiques et guerres oubliées. Il s'agit de billets courts commentant des photographies particulièrement explicites (qui pourront intéresser les professeurs d'histoire-géographie dans leur démarche pédagogique) sur des terrains aussi variés que la Somalie, le Cachemire, l'Irak, la Côte-d'Ivoire, le Pérou, la Russie...

Le blog de Philippe Leymarie (journaliste au Monde diplomatique) sur les questions de défense et de sécurité. A travers la belle présentation des blogs du Diplo, l'auteur propose des articles sur le matériel, sur les accords militaro-politiques, sur les évolutions des missions militaires...

Pour tous ceux qui s'intéressent à la géographie des populations et à la démographie, le blog Populations du monde offre de nombreuses informations sur tous les pays du monde. La forme "blog" permet de suivre une actualité sur la démographie (le dernier billet explique ainsi que la ville de Kinshasa vient d'atteindre 10 millions d'habitants, ce qui n'est pas sans poser de multiples problèmes tant en termes de gouvernance urbaine, de salubrité de certains quartiers, d'habitat informel...), tandis que la recherche peut également se faire par pays, pour toute recherche très spécifique.

On retrouve avec plaisir le géographe et cartographe Philippe Rekacewicz dans son blog Visions cartographiques qu vient, après un an de silence, de reprendre son activité avec une analyse de la crise lettone. A travers des cartes et des esquisses de cartes, l'auteur propose une lecture des principaux conflits et crises dans le monde, en proposant un regard sur la carte comme outil de compréhension tout comme outil de propagande politique.

Soutenance de thèse : Alger, réflexion sur la violence. Essai d'articulation à l'urbanisation et aux transformations sociales en cours


La période est propice aux soutenances de thèses (pour des informations sur de nombreuses soutenances en études urbaines, voir le site Crévilles.org). Sous la direction de Thierry Paquot, Farida Seddik-Meghesli soutiendra sa thèse sur Alger, réflexion sur la violence. Essai d'articulation à l'urbanisation et aux transformations sociales en cours le mardi 13 octobre 2009 à l'Institut d'urbanisme de Paris (Université Paris 12 - Val de Marne) à partir de 14h30.



Résumé des objectifs de la thèse :

Nous avons mené dans le cadre d'un DEA en urbanisme une réflexion sur le conflit sanglant vécu en Algérie au cours de ces dernières années et tenté de comprendre sa genèse très urbaine à travers l'étude des spécificités de l'urbanisation algéroise, car Alger a été le territoire de la naissance de ce conflit, mais aussi l'enjeu de luttes urbaines silencieuses pendant de longues années, et on a vu que les tensions et les disparités ont fini par aboutir à une implosion qui s'est manifestée au sein de groupes sociaux dont l'installation urbaine a été fortement contrariée, qui ont pu s'organiser dans les quartiers de l'urbanisation clandestine, au début malgré l'Etat, puis pour finir, contre l'Etat, au moment de l'éclatement du conflit sanglant, suite à l'arrêt du processus électoral en janvier 1992.

C'est dans ces quartiers illicites que se sont développées, entre autres, dans le processus même de leur création malgré l'Etat, de nouvelles solidarités urbaines, vécues par une jeunesse en quête de sens, et qui a pris la figure de la religiosité revivifiée, pour développer les pratiques communautaires identitaires-islamiques (par opposition au modèle étatique "moderne"), et d'entreaide et de solidarité (dans un environnement de gestion urbaine inexistant ou défaillant).
L'afflux vers la ville (même périphérique) est une nouvelle expérience pour les migrants de l'intérieur, ils y côtoient une population plus anciennement urbanisée, dont les comportements sont sinon acceptés, en tout cas imposés :
  • Quelles transformations sociales ont accompagné ces installations urbaines périphériques ?
  • En quoi la violence qui s'est exprimée à Alger est-elle comparable à cette violence qui devient une caractéritisque des grandes villes ?
  • En quoi est-elle spécifique, pourquoi s'est-elle quasiment transformée en guerre civile ?
  • Comment s'est passé le passage du communautarisme religieux socio-solidaire vers l'islamisme radical accompagné de l'idéal de la guerre sainte, le Djihad ?

Nous avons aussi à faire une réflexion sur le processus de création de l'Etat algérien, avec sa configuration moderne (comme modèle hérité de la colonisation et comme modèle de référence annoncé) après avoir relevé la critique de la réalité de sa construction, qui s'est accompagnée d'une structure tribale et clientéliste fonctionnant en réseau fermé, et qui a utiliséla violence légale contre la population opposante avec la justification du maintien de l'ordre... (quel ordre ? l'ordre clientéliste ou l'ordre de l'Etat de droit ?)

Un désarroi profond accompagne les mutations sociales et urbaines, car devant la destruction de structures anciennes d'organisation qui étaient cohérentes, la modernité et l'urbanisation demandent une redéfinition des valeurs... Nous mènerons une réflexion et une étud de terrain sur ces manifestations.


Séminaire "Sécurité, Union européenne et relations transatlantiques"


Le 2nd séminaire du groupe de recherche SUERTE ("Sécurité, Union européenne et relations internationales transatlantiques") aura lieu le jeudi 15 octobre 2009, de 14h30 à 17h00, au Centre d'études et de recherches internationales (CERI, 56 rue Jacob, Paris 6ème, salle du Conseil, 4e étage, accès libre) sur le thème "Sécurité, dataveillance et base de données", avec pour intervenant Louise Amoore (Reader, Department of Geography, Durham University, voir les sites des centres de recherche Data Wars et Contested Borders).

Ce séminaire porte sur les pratiques de surveillance par les données (dataveillance) et la question des bases de données. La discussion s'attachera notamment à l'identification des différentes bases de données existantes aux Etats-Unis (ex : le programme VISIT d'enregistrement des passagers) et dans l'Union européenne (ex : bases CIS, SIS-1 et SIS-2, VIS), des agences et services qui ont accès, de manière formelle ou informelle, à celles-ci, et des systèmes de relations et de compétition qui se nouent autour de l'accès aux informations et de l'échange d'informations. Il s'agira également de réfléchir aux liens entre la disponibilité et la mise en place de tels outils, et l'évolution des pratiques de sécurité contemporaines vers la destion des risques, le "profiling", et plus généralement, vers une logique de prévention et de pro-activité.

Contacts :
- Julien Jeandesboz (julien.jeandesboz@sciences-po.org)


mercredi 23 septembre 2009

Soutenance de thèse : Aux marges de la ville, les populations déplacées par la force : enjeux, acteurs et politiques


Le site Crévilles.org annonce la soutenance de thèse d'Agnès de Geoffroy le jeudi 24 septembre 2009 à l'Université Paris 8 (14h, bâtiment D, salle D 143), sous la direction de Marie-France Prévôt-Schapira sur la question des déplacés de force : Aux marges de la ville, les populations déplacées par la force : enjeux, acteurs et politiques. Etude comparée des cas de Bogota (Colombie) et de Khartoum (Soudan).



Résumé de thèse :

"Les personnes déplacées par la force, que l'on appelle aussi les personnes déplacées de l'intérieur (Internally Displaced Persons, IDPs) ont été définies par l'Organisation des Nations Unies en 1998 comme des personnes ayant "été forcées ou contraintes à fuir ou à quitter leur foyer ou leur lieu de résidence habituel, notamment en raison d'un conflit armé, de situations de violence généralisée, de violations des droits de l'homme ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l'homme ou pour en éviter les effets, et qui n'ont pas franchi les frontières internationalement reconnues d'un Etat".

L'intérêt porté à ces populations n'a cessé de croître depuis une vingtaine d'années et la communauté internationale s'est progressivement structurée pour apporter une réponse humanitaire à ce phénomène. La liberté d'intervention et d'action des acteurs de l'aide est cependant limitée par la souveraineté de l'Etat dans lequel se produit le déplacement, l'Etat restant théoriquement le premier et le dernier responsable sur son territoire.

Pour comprendre les enjeux qui émergent et qui se nouent autour de ces populations installées en ville, deux études de cas ont été choisies, Khartoum et Bogota. Les populations déplacées y sont nombreuses, et leurs arrivées anciennes et successives permettent d'étudier les processus d'intégration ou de non intégration à l'oeuvre dans le milieu urbain, les divers acteurs qui interviennent auprès des déplacés et les stratégies qu'ils adoptent."



Les travaux d'Agnès de Geofrroy montrent bien la pertinence de la question des déplacés dans la ville par temps de guerre, mais aussi dans le temps long de l'après-guerre (ou catastrophe), en confrontant les mobilités aux jeux des acteurs syntagmatiques de la ville (qu'ils soient officiels ou officieux). Concernant les villes de Khartoum et de Bogota, on retrouvera donc deux de ses textes :


A ce propos, on retrouvera également les travaux d'une autre doctorante en géographie, Jeanne Vivet, sur le lien entre migrations forcées et citadinisation à Maputo et Luanda (voir ici un article sur Maputo).


"Géopolitique du conflit israélo-palestinien. Les hommes, la terre, l’eau" (J.-M. Deblonde et P. Veyron)


Pour ceux qui tenteraient de démêler la situation très complexe dans le territoire israélo-palestinien, un récent ouvrage, rédigé par un géographe et un historien, tente de faire le point. Les références aux spécialistes du conflit israélo-palestinien et du Moyen-Orient (Encel, Laurens, Picadou, Mutin...) permettent aux auteurs d'apporter un texte clair et concis, accessible à tous ceux qui ne sont pas spécialistes de cette question, mais tentent d'en savoir plus.



Jean-Marie Deblonde et Philippe Veyron, 2009, Géopolitique du conflit israélo-palestinien. Les hommes, la terre, l'eau, Ellipses, Paris, 237 p.



"Beaucoup d'auteurs ont proposé, ces dernières années, une lecture géopolitique du conflit israélo-palestinien (parmi lesquels on retrouvera notamment les travaux du géographe Frédéric Encel, qui décrivent avec précision les territorialités et les intentionnalités conflictuelles à l'oeuvre dans cet espace disputé par deux peuples qui se définissent en rejet de "l'Autre"). Dans ce nouvel ouvrage, les auteurs, un historien (Philippe Veyron) et un géographe (Jean-Marie Deblonde) appuient leur analyse à travers une grille de lecture entre géohistoire et géopolitique, et participent ainsi à la connaissance des tensions israélo-palestiniennes au prisme de ce que l'on pourrait nommer une "géopolitique historique"."



mardi 22 septembre 2009

Kosovars ou Kosoviens ? Nommer les lieux, nommer les peuples


Dans son blog Etudes géopolitiques européennes et atlantiques, Olivier Kempf a publié un article très intéressant faisant un état des lieux de la région balkaniques ("Nouvelles euro-balkaniques", 15 septembre 2009) et pose la question du nom des lieux : "Le titre de ce billet fera sursauter les plus sourcilleux : les Balkans sont en Europe !". Plusieurs précisions sur le nom des lieux : nommer c'est d'abord donner une identité, et signaler une appropriation et/ou une appartenance du territoire ainsi nommé. C'est donc un fort symbole à la fois identitaire et politique. Le nom d'un lieu est un marqueur important de l'identité, qui permet à la fois de s'approprier l'espace et de construire une identité spatiale. A ce propos, Paul Claval écrit dans le sous-chapitre "Nommer les lieux, qualifier les espaces" de son ouvrage Géographie culturelle. Une nouvelle approche des sociétés et des milieux qu' "il ne suffit pas reconnaître et de s'orienter. L'explorateur veut conserver la mémoire des terres qu'ils a découvertes et les faire connaître à tous ; pour parler des lieux et des milieux, il n'est d'autre moyen que de procéder au baptême du terrain et à l'élaboration d'un vocabulaire propre à qualifier les diverses facettes de l'espace" (Armand Colin, collection U, Paris, 2003, p. 121).


Le terme "Balkans" n'est plus aujourd'hui utilisé dans le vocabulaire de la communauté internationale qui lui préfère "l'Europe du Sud-Est". Il ne s'agit pas seulement d'une anecdote, mais bien d'un symbole important (et politiquement correct !) : dans l'imaginaire collectif, le terme de "Balkans" est associé à la guerre et à la violence, aux massacres de masse et aux nettoyages ethniques. Le changement de nom pour désigner une même aire géographique permet ainsi de souligner une nouvelle ère (aire ?), et d'imposer à l'imaginaire collectif une "réalité", ou tout du moins une apparence de stabilité. L'interrogation d'Olivier Kempf sur une région euro-balkanique prend toute son importance dans ce contexte de re-nomination des lieux, puisque le mot "euro-balkanique" ne fait pas allusion à la dénomination géographique (les géographes ne s'accordant d'ailleurs pas sur les délimitations des Balkans), mais bien à un discours politique, au vu d'une région balkanique non intégrée dans l'Union européenne, pourtant bordée par celle-ci, et amenée à court terme à intégrer l'Union européenne. La région constitue d'ailleurs une étrange "zone grise" dans les mouvements d'élargissement de l'Union européenne, soulignant par là que changer le nom dans les textes officiels de la communauté internationale n'est pas suffisant pour changer l'image d'un territoire.





On pourrait faire le même constat à travers une carte du tourisme en Europe : les flux contournent les Balkans, et à l'exception de la Croatie, et plus modestement de la Slovénie, les pays de l'ex-Yougoslavie n'attirent pour l'heure qu'une poignée marginale des touristes en Europe. Pourtant, le tourisme est fortement lié à l'image d'un territoire, au fantasme territorial qu'il crée dans l'imaginaire du touriste. Analysant le lien entre tourisme et terrorisme, Philippe Kerourio, auteur du site Géotourisme, montre que "l'image devient un facteur crucial dans le choix d'une destination. En 1985, 28 millions d'Américains ont voyagé à travers le Monde. 162 ont été tué ou blessés par une activité terroriste, soit une probabilité de 0,00057 % de devenir victime du terrorisme. En dépit de cette faible probabilité, 18 millions d'Américains ont changé leur plan de voyages en regard des événements terroristes de l'année précédente, soit 6,43 % du volume de voyages à l'étranger de l'année précédente" ("Le Terrorisme et le Tourisme", Géotourisme). Bien sûr il existe un "tourisme de guerre" (voir le reportage de l'émission Envoyé spécial datant du 8 janvier 2009 sur "Irak, tourisme au front"), mais cela reste marginal. Dans les Balkans, il s'agit plutôt d'un "tourisme d'après-guerre", tel celui qui anime les cimetières militaires, les anciennes lignes de démarcation, les holocaustes... (voir "Balkans : le "tourisme de guerre" booste l'attrait pour la région", B92, 26 août 2008, traduit par Persa Aligrudic, pour Le Courrier des Balkans, le 14 septembre 2008). Pour le reste du tourisme, le "tourisme de masse", les pays de l'ex-Yougoslavie restent en majorité à l'écart des flux les plus importants.




Les pays de l'ex-Yougoslavie restent en grande partie méconnus, au-delà du contexte des guerres des années 1990. Dans ce contexte, les (con)quêtes identitaires prennent non seulement une importance à l'intérieur du territoire, mais se tournent également vers l'extérieur. Et imposer une toponymie fortement chargée en symboliques comme la toponymie reconnue internationalement est une forme de reconnaissance et de victoire sur "l'Autre". Dans ce contexte, le cas du Kosovo est particulièrement explicite. Si la presse française parle unanimement des "Kosovars" pour désigner les habitants du Kosovo, cette appelation n'est pas évidente pour les habitants eux-mêmes. Tout d'abord, le "peuple kosovar" peut-il se définir par un territoire dont le statut est aujourd'hui encore l'objet de nombreuses rivalités (l'indépendance étant l'objet de nombreuses contestations, et sa reconnaissance étant loin d'être acquise en termes de droit international) ? Mais, plus encore, la question de l'émergence d'un "peuple kosovar", qui semble être un acquis vu de l'extérieur si l'on s'en tient au fait même d'employer ce mot et à la récurrence de l'utilisation d'un tel vocabulaire dès qu'il s'agit du Kosovo, se pose au regard des constructions identitaires à l'oeuvre. S'affirmer "Kosovar" est une revendication très récente : longtemps, les habitants du Kosovo s'identifiaient eux-mêmes comme Albanais du Kosovo, Serbes du Kosovo, Ashkalis du Kosovo... Pas de littérature, de langue, d'arts dits "kosovars" (et pourtant, ce sont de forts indicateurs de l'émergence d'un peuple qui se reconnaît comme tel), mais une littérature, un cinéma, des arts serbes d'un côté, albanais de l'autre, et en marge les petites minorités possèdent elles aussi les Arts propres. Le "peuple kosovar" est une construction sociale, politique et identitaire en cours, qui symbolise avant tout le rejet de "l'Autre", et la "victoire" sur ce dernier (puisqu'il ne peut accéder au statut de peuple possédant et s'étant approprié le Kosovo).


A l'image de la Bosnie-Herzégovine, où l'on identifie distinctement les Bosniaques (peuple) et les Bosniens (tous les habitants de Bosnie-Herzégovine quelque soit leur identité), on apprécie tout particulièrement le choix d'Olivier Kempf de parler des "Kosoviens" (ou Kossoviens, pour ceux qui poussent la logique de neutralité en parlant du Kossovo) pour désigner l'ensemble des habitants du Kosovo. Tous les Kosoviens ne sont donc pas les Kosovars. Et tous les Kosovars ne résidant plus sur ce territoire (notamment les réfugiés qui ont fui la guerre et ne sont pas retournés chez eux après celle-ci) ne sont donc pas Kosoviens. Il n'existe pas une symétrie entre les deux termes dans ce territoire à l'identité en construction.



A lire :

  • Nommer les lieux au Kosovo (étude de cas sur les noms pour le Kosovo et pour la ville de Mitrovica) sur le site Géographie de la ville en guerre.

  • Le numéro de la revue L'Espace politique sur les "Néotoponymie", qui (principalement à travers des études de cas) montre combien les appelations influencent l'identité d'un territoire (n°5, 2008/2). L'édito de Frédéric Giraut et de Myriam Houssay-Holzschuch, "Néotoponymie : formes et enjeux de la dénomination des territoires émergents", montre bien que "la toponymie est ici considérée dans ses rapports avec le nouveau régionalisme qui fait émerger de nouveaux territoires avec notamment la création de nouvelles municipalités, de nouvelles régions et de territoires de projet issus de la coopération entre territoires existants".

  • Le numéro de la revue Mots. Les langages du politique consacré aux "Toponymes. Instruments et enjeux" (n°86, mars 2008, en accès libre en mars 2010) qui permet de confronter différentes utilisations politiques des toponymes dans la construction de l'identité, de la mémoire, de l'imaginaire collectif...

  • Le dossier sur la "Toponymie" dans la revue L'Espace géographique (tome 37, 2008/2) qui analyse des pratiques-types des recompositions territoriales et toponymiques, et propose des études de cas sur le lien entre territoire/toponyme/identité à différentes échelles.



mercredi 16 septembre 2009

Nouveaux défis à la pensée stratégique


Journée d’étude de l’IRSEM
Nouveaux défis à la pensée stratégique

Mardi 6 octobre 2009, de 8h30 à 17h30
Amphithéâtre Foch - École Militaire, Paris



9h00 – Mot d’accueil : Frédéric Charillon, directeur de l’Institut de Recherche Stratégique de l’école militaire (IRSEM).



9h05 – Ouverture : Général d’armée Jean-Louis Georgelin, chef d’état-major des armées.



9h20-10h20 : Quels buts, quelles priorités pour la pensée stratégique ?
Un regard extérieur.

. Theodor Winkler, ambassadeur, directeur du Centre pour le contrôle démocratique des forces armées de Genève (DCAF).

. Sven Biscop, directeur du Programme Sécurité et Gouvernance Globale à Egmont, Institut Royal des Relations Internationales de Bruxelles.

. Colonel Michael S. McGurk, chef du bureau de la coopération de défense, ambassade des Etats-Unis en France.

Président de séance : Frédéric Charillon, directeur de l’IRSEM.



10h20-11h20 :Les intérêts stratégiques français : quelles priorités ?

. Contre-amiral (2S) Jean Dufourcq, directeur d’études à l’IRSEM.

. Dominique David, directeur exécutif de l’IFRI.

. Raphaël Pouyé, Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix (Université de Montréal), ancien conseiller politique de l’EUFOR Tchad-RCA.

Président de séance : Général de division Patrick Bazin, directeur adjoint de la Délégation aux Affaires stratégiques (DAS).



11h30-12h - Allocution de Monsieur Hervé Morin, ministre de la Défense.



14h00-15h15 : Les acteurs stratégiques français : quelles particularités ?

. Claude-France Arnould, directrice générale pour les questions de défense au Secrétariat général du Conseil de l’Union européenne.

. Niagalé Bagayoko-Penone, chercheure à l’Institute for Development studies (IDS), Université de Sussex.

. Bastien Irondelle, chargé de recherche au Centre d’Etudes et de Recherches Internationales (CERI).

Président de séance : Contre-amiral Arnaud de Tarlé, EMA, officier général, chef de la cellule études et prospectives.



15h45-17h : La pensée stratégique française : quelles spécificités ?

. Yves Fromion, député, membre de la commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale.

. Jean-Jacques Roche, directeur de l’Institut Supérieur de l’Armement et de la Défense (ISAD), Université Paris 2.

. Colonel Jérôme Pellistrandi, directeur des Études et de la Prospective à l’École des Transmissions de Cesson Sévigné.

Président de séance : Jean-François Bureau, secrétaire général adjoint de l’OTAN pour la diplomatie publique.



17h00 - Clôture : Pierre Lellouche,secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes


lundi 14 septembre 2009

Géopolitique des drogues


Une citation extraite de l'ouvrage de Rémi Baudouï, Géopolitique du terrorisme. Les territoires de l'insécurité de la mondialisation (Armand Colin, collection 128, Paris, 2009, p.26) qui montre bien que l'insécurité n'est pas seulement une réalité, elle relève également de discours qui "formatent" le regard que l'on porte sur le Monde et sur les territoires du danger. Dans ce contexte, le cas des drogues est particulièrement révélateur d'un découpage du Monde entre pays producteurs (souvent considérés comme les territoires dans lesquels il faut intervenir pour faire cesser ces trafics illégaux, et sont pointés du doigt comme des territoires menaçant la sécurité mondiale) et les pays consommateurs (qui sont pourtant les principaux fléaux, puisqu'ils "activent" la demande et la mise en réseau des trafics de drogue à l'échelle mondiale). Pourtant, un tel découpage du Monde au regard des drogues "formate" les politiques sécuritaires, tant intérieures qu'extérieures.


"
La distinction opérée entre Etats producteurs et Etats consommateurs rend compte de cette perception politique de l'usage de la drogue vécu sur le plan international comme un système à part entière de destruction des forces vives des nations occidentales
".



A consulter : l'excellent site du géographe Pierre-Arnaud Chouvy, avec de nombreuses photographies commentées, une cartographie très précise et de nombreuses analyses (tant à l'échelle locale qu'à l'échelle mondiale).



L'émission Le Dessous des cartes a d'ailleurs consacré trois émissions sur la question du terrorisme en 2005 :

Le Dessous des cartes - "Terrorisme 1/3 : Les origines et l'histoire"
Emission du 13 avril 2005 (voir les cartes)



Le Dessous des cartes- Terrorisme 2/3 : "Définition et classement"
Emission du 20 avril 2005 (voir les cartes)



Le Dessous des cartes - "Terrorisme 3/3 : Religion et pouvoir"
Emission du 27 avril 2005 (voir les cartes)


dimanche 13 septembre 2009

La carte-discours. Quelques éléments de réflexion


Tout géographe est confronté à l'exercice de la cartographie. Avec comme question primordiale : comment produire une carte qui s'approche de l'objectivité ? Découper les territoires et cartographier ce découpage relèvent d'une mise en visibilité d'une certaine lecture du Monde. Une carte n'est pas un document objectif, mais témoigne d'une interprétation des logiques spatiales, mise en scène par son auteur. La cartographie, réalisée avec une scientificité rigoureuse (c'est-à-dire par un auteur qui l'appuie de sa démarche réflexive, de ses sources, et éclaire tant ses intentionnalités que son intellectualisation des phénomènes observés), peut néanmoins tendre vers l'objectivité. Pourtant, il ne faut pas oublier que la carte est une forme de discours, et que son auteur n'est pas toujours versé dans l'objectivité (on recommendera la (re)lecture de l'ouvrage de Marc Monmonier, Comment faire mentir les cartes. Du mauvais usage de la géographie, Flammarion, Paris, 1993).

De plus, la carte est non seulement produite par celui qui la conçoit et traduit ainsi graphiquement son interprétation du Monde, mais elle est également reçue par des observateurs qui surajoutent leur propre interprétation. De ce fait, la carte peut être manipulée par son auteur, et/ou mal réceptionnée par son lecteur (et parfois détournée à des fins politiques). Alors qu'elle semble apporter une vérité absolue (après tout, on a tous appris à l'école que le savoir géographique passait par la véracité des cartes de localisation), la carte peut être un outil de propagande politique et doit nécessairement replacée dans son contexte de production et de diffusion, à la fois politique (son auteur cherche-t-il l'objectivité scientifique ou au contraire la traduction de son engagement politique ? quelles sont les intentionnalités révélées ou cachées de ceux qui diffusent la carte ?) et épistémologique (dans quel courant de pensée se situe celui qui produit la carte ? en quoi cela influence-t-il son interprétation du Monde ?).

En outre, le choix des figurés n'est jamais innocent : ils sont à la fois des signifiés (dans la mesure où l'auteur de la carte leur donne du sens, à travers la légende) et des signifiants (puisque, par leur forme ou leur couleur, ils produisent en eux-mêmes du sens, en appelant à des références indirectes). Bien sûr, il existe des normes, tout particulièrement pour la cartographie d'éléments physiques (mers et océans en bleu, montagnes en marron...). Mais la cartographie des logiques sociospatailes dépasse ces codes : le rouge, pour ne prendre que ce cas de figure, donne du sens, par exemple pour figurer les territoires de la violence. Associer à des couleurs plus "douces", il devient plus visible que les autres figurés dans une carte. Se pose alors une autre question, quant à la réception et à l'interprétation de la carte : les couleurs et les figurés ne seront pas interprétés de la même manière en fonction de celui qui reçoit la carte, de par le monde. On peut, dès lors, appliquer la théorie des filtres de représentations proposée par le géographe Jean-Pierre Paulet (que l'on retrouvera dans le billet "Villes en guerre et fragmentations" daté du 12 octobre 2008) pour montrer la différence entre paysage objectif et paysage perçu par un observateur fort de son expérience, de son bagage intellectuel, culturel, politique et social, de ses pratiques spatiales, et même de son état de pensée au moment de l'observation, à la lecture d'une carte. Exception faite (mais notable !) qu'il n'existe pas de carte objective, mais bien une carte produite et une carte perçue. La carte est une image construite, et participe donc à une opération de séduction vis-à-vis de celui qui la reçoit, en tant que discours de son auteur (ou de son commanditaire).



"La cartographie est un langage ; elle a ses systèmes lexicaux et sémantiques. Par la forme produite, la carte établit une relation entre pensée et réalité. Elle est donc d'une certaine manière un discours sur l'espace et les territoires. Ce discours a la particularité de recourir au langage iconographique et de ce fait, de renvoyer aux "règles de la sémiologie graphique". La mise en oeuvre de ces règles donne toute sa force à l'image cartographique et explique ses énormes capacités de séduction. En s'imposant, l'image pourrait accréditer l'idée qu'elle dit "la vérité", ce qui serait une manière très naïve ou bien très cynique d'utiliser la carte."

Thérèse Saint-Julien, dans Collectif, 2009, Dictionnaire de l'aménagement du territoire.
Etat des lieux et prospective, Belin, Paris, p. 277.




Quelques sites/blogs incontournables sur la cartographie :

  • Le blog "Strange Maps", qui décrypte les sens et les motivations derrière les cartes-discours (en anglais, mais utilisant de nombreuses cartes parues dans des publications françaises, facilement accessibles).
  • Le site "Cartographier le présent" qui présente de nombreuses cartes et des réflexions sur la conception de cartes, autour de la question des énergies (à plusieurs échelles).
  • Le blog de Philippe Rekacewiwicz, géographe et cartographe, journaliste pour Le Monde diplomatique, "Visions cartographiques". S'il n'est plus tenu à jour, il propose de nombreuses réflexions sur la conception de la carte et sa manipulation en tant que discours politique.
  • Le blog "Terrimago", qui se propose d'analyser les sens, les utilisations et les nombreux dérivés de la carte. Très souvent actualisé, on remarquera tout particulièrement les billets sur "Guerre, géographie et cartographie", et "La carte, ça sert à oublier la guerre".

A lire :


vendredi 11 septembre 2009

Sport, violence, politique et processus de paix dans les Balkans

Sur son blog Anthropologie du présent, Alain Bertho nous apprend le déclenchement d'émeutes dans la ville de Mostar suite au match de football Angleterre-Croatie du mercredi 9 septembre 2009. Pour le contexte sportif, L'Equipe signale qu' "après la cinglante défaite de la Croatie contre l'Angleterre mercredi soir (1-5) dans les qualifications au Mondial 2010, des incidents ont eu lieu dans la partie croate de la ville de Mostar (l'autre étant à majorité musulmane), au sud de la Bosnie. Plusieurs hooligans ont blessé six policiers et trois personnes en leur lançant des bouteilles et autre projectiles, détruisant au passage les vitrines de nombreux magasins. La police a répliqué à coups de gaz lacrymogène, avant de finalement arrêter huit personnes, dont trois mineurs. Malgré ce revers, la sélection croate occupe la deuxième place du groupe 6 (17 pts), synonyme de barrage à seulement deux points de l'Ukraine (15 pts), les Anglais ayant assuré leur ticket (24 pts)" ("Hooligans croates en colère", L'Equipe, 10 septembre 2009). Passé le contexte particulier de la sélection pour le Mondial 2010, ce qui pourrait sembler n'être qu'une anecdote au sein des stades de football, marqué par des actes de violence au-delà du contexte balkanique, est en réalité révélateur de plusieurs questions quant à la violence dans le contexte de l'après-guerre et à la politisation des loisirs.

La question du "sport" est souvent analysée au regard de l'expression de tensions sociales et/ou identitaires entre supporters d'équipes différentes. On peut s'interroger sur le sens du sport accordé par la médiatisation de certains événements, en relation avec une violence politisée, telle celle que l'on observe aujourd'hui dans le football. Il n'est pas innocent de voir ces violences arriver dans la ville hautement symbolique de Mostar. Symbolique, du fait de sa division intercommunautaire, matérialisée par son pont, détruit pendant la guerre, et reconstruit, inauguré comme symbole de la réconcialiation, mais devenu au final peu fréquenté par les habitants qui contournent le territoire de "l'Autre" dans leurs pratiques spatiales quotidiennes. "Ainsi à Mostar, ville principale de l’Herzégovine et à ce titre revendiquée à la fois par les Croates et par les Musulmans. Mostar est une ville qui de longue date était divisée en un centre historique et touristique de population musulmane et des quartiers de la rive occidentale de la Neretva, avec leur propre centre-ville de population croate. Les affrontements entre Croates et Musulmans, pour la maîtrise de la ville ont abouti à la destruction par l’artillerie d’une grande partie du centre et de son quartier ancien et du pont qui en était le symbole. Depuis, le pont aussi bien que les bâtiments du centre ancien ont été reconstruits. Mais de très vastes bâtiments de l'époque austro-hongroise, à finalité administrative ou militaire, restent détruits avec leurs façades béantes, et les ruraux ont afflué. Aujourd'hui, la ville est majoritairement croate, mais le centre historique est musulman ou si l'on préfère bosniaque. En outre, la population a totalement changé : on estime que 60 % de l'ancienne population est partie : les Serbes, entre autres, ont quitté la ville" (Michel Sivignon, 2009, Les Balkans : une géopolitique de la violence, Belin, collection Mappemonde, Paris).

Le sport peut être un théâtre pour la mise en scène de discours politiques, notamment à travers sa forte médiatisation, qui permet de diffuser ce message politisé au plus grand nombre. Le lien entre culture de masse et médias fait donc de certains sports, tels que le football en Europe, des vecteurs privilégiés de discours politiques, mis en scène à travers des scènes de violence, telles les émeutes des hooligans ce mercredi 9 septembre 2009 à Mostar. Le stade est un lieu privilégié d'expression politique, et peut être mis en scène comme une arène de conflit, tout comme une arène de réconciliation. D'autres intérêts se jouent donc au-delà des résultats sportifs, et la forte médiatisation de certains sports en font des cibles privilégiées de cette transformation du sens du sport en un message politisé.

Le football a, par ailleurs, été utilisé par l'ONG Sports sans frontière ou par les militaires français déployés dans la ville de Mitrovica (comme dans d'autres lieux des Balkans) comme moyen de réconciliation des populations, en touchant principalement des enfants qui ne se connaissaient pas, ne se côtoyaient pas (habitant chacun sur une rive, dans leur quartier-territoire fortement connuanutarisé). Certes, ces actions sont très circonscrites dans l'espace et dans le temps, ainsi que dans le nombre d'habitants touchés. Elles n'intéressent d'ailleurs que peu les médias, et tentent avant tout de transmettre un "vivre ensemble" par le biais des valeurs du sport (telles que le fair-play) et d'une passion commune (le plaisir de jouer dépassant, par exemple, les barrières linguistiques qui opposent les enfants de Mitrovica, et empêchent des rencontres entre enfants serbes et albanais de la ville, les adultes oeuvrant pour que ne soit pas enseignée la langue de "l'Autre").

Le sport comme moyen de matérialiser le processus de réconciliation dans les Balkans, c'est également le projet récent de la Commission européenne qui organise un parcours cycliste le long du danube afin de favoriser le dialogue intercommunautaire dans la région balkanique (voir "La poudrière des Balkans à vélo", Le Courrier international, 8 septembre 2009). Plus que le fair-play, le vélo apporte ici une vitesse modérée qui permet aux participants de partager leur ressenti, leurs efforts, le paysage, et de se découvrir un patrimoine commun, qu'il serait absurde de menacer par des conflits qui éloignent des gens finalement très proches.

Le sport entretient un lien très étroit avec la politique, dans la mesure où l'engoument des populations pour tel ou tel sport peut lui octroyer un puissant rôle de vecteur culturel et identitaire. Il n'est pas anecdotique que les victoires des sportifs soient ressenties avec un sentiment national, que les sportifs puissent recevoir des distinctions et des honneurs de l'Etat... Si certains jeux traduisent des enjeux géopolitiques sur leurs plateux, les sports peuvent eux devenir des plateaux de jeux pour l'expression d'enjeux politiques, sociaux et identitaires. Le terrain de sport devenant ainsi un terrain d'action pour des acteurs déstabilisateurs comme pour les acteurs de la (ré)conciliation, dans la mesure où le sport, en tant que loisir de masse, permet une mise en scène d'enjeux politiques.



A écouter : les interventions de Pascal Boniface sur France Info, qui, dans le contexte des Jeux olympiques de Pékin, est revenu sur différents aspects de la géopolitique du sport actuelle et passée.


A retrouver :une bibliographie sur "Sport : jeux et enjeux", qui sert de première base pour tous ceux qui s'intéressent aux liens entre sport et politique.


A noter que la revue Politique africaine prépare un numéro spécial "Football et politique en Afrique" à paraître en juin 2010 : "La Coupe du monde de football, qui se jouera en 2010 en Afrique du Sud, est annoncée comme un moment important pour l’Afrique du Sud et pour l’ensemble du continent. Elle est présentée comme une alternative audacieuse à l’afro-pessimisme, qui devrait replacer « l’Afrique » au cœur de la scène internationale. À travers cet événement, la FIFA et les organisateurs entendent célébrer explicitement « l’humanité » de l’Afrique, personnifiée par Zakumi, la mascotte de 2010 qui « symbolise les valeurs de l’Afrique du Sud et du reste du continent africain : confiance en soi, fierté, hospitalité, accueil chaleureux et sociabilité. » Au-delà de cette vision officielle, la Coupe du monde 2010 dévoile de multiples enjeux et significations politiques sur lesquels ce dossier se propose de revenir".

dimanche 6 septembre 2009

Géographie des mers (FIG 2009)


Le Festival international de géographie (FIG) 2009 sera consacré, pour sa 20ème édition, aux mers et aux océans, et se déroulera du 1er au 4 octobre 2009 dans la capitale de la géographie Saint-Dié-des-Vosges. En attendant de pouvoir assister aux nombreux débats qui confronteront à la fois les représentations des espaces maritimes (entre fascination, peur et attirance), leurs enjeux économiques multiscalaires et leurs enjeux géopolitiques, voici des éléments du programme de cette année, autour du 6 itinéraires scientifiques consacrés à la géographie des mers et des océans, et un itinéraire consacré au pays invité : l'Espagne. Le programme provisoire est désormais disponible en ligne. Parmi les différents itinéraires, on retiendra en particulier l'axe "Les océans : enjeux de guerre, enjeux de paix".




Mers, océans… entre mystère, fascination et peur

Les abysses, autant que l’immensité des océans ont toujours fasciné les hommes. Les premiers navigateurs confrontés à l’inconnu, au blanc des cartes, aux découvertes, mais également les écrivains, qui tels Jules Verne, peuplaient les profondeurs de créatures monstrueuses.

Quel est l’apport des géographes dans la connaissance du monde océanique ? Comment se sont développées les techniques sous-marines ? En quoi contribuent-elles à notre développement mondialisé ? Comment avons-nous apprivoisé le blanc des cartes, des premières cartes marines aux images satellites actuelles ?




Mers et océans tels qu'ils sont, tels qu'ils vont

Les hommes et les océans sont face à une vulnérabilité partagée. Sans l’homme ou avec l’homme, comment évoluent les milieux marins ? Que connaissons-nous réellement du fonctionnement des mers et des océans ?

Océans poubelles, pollutions, mais qui répare, qui paie ? Ressources halieutiques : épuisement ou régulation ? Quel avenir pour l’aquaculture ? La mer peut-elle nourrir les hommes ? Ressources sous-marines, rêve ou réalité ? Partage du butin ou affrontement ? Energies renouvelables ou exploitation des énergies fossiles off-shore ? Changement Climatique Global : quand les trait de côte actuels vont disparaître, où vont aller les hommes ? Comment adapter les littoraux aménagés ? Comment protéger les littoraux menacés ?




Les océans dans le cyclone de la mondialisation

Si les océans séparent, ils constituent aussi de formidables espaces de transport et présentent des ressources encore mal évaluées. Comment gère-t-on ces différentes formes de développement ?

Un monde de flux, comment les transports maritimes redessinent la carte du monde ? Les grands ports dans le monde, interface incontournable de la mondialisation ? Développement comparé des grands ports du monde, la France a-t-elle sa chance ? La pêche dans le monde, un pillage sans fin ? Quelles tensions, quelles solutions autour des réserves halieutiques ? Les réserves sous-marines rêve ou réalité ? A qui appartiennent ces ressources ? Les énergies renouvelables ou le développement off-shore des énergies fossiles ?




Les océans : enjeux de paix, enjeux de guerre

Les océans sans partage ?

La piraterie moderne, réminiscences anciennes ou conséquence d’une mondialisation effrénée ? Comment la France a-t-elle réussi à devenir le deuxième territoire maritime dans le monde ? A qui appartient la haute-mer ? et les grands fonds, les hautes latitudes : à qui appartiennent les ressources une fois ces frontières franchies ? Les grandes puissances maritimes du globe, quels nouveaux arrivants, quelles logiques, quelles perspectives ? Comment émergent des puissances maritimes sous pavillons de complaisance ?




Le tourisme et la mer : un couple infernal ?

Le développement touristique balnéaire est ambigu, comment aborder sereinement cette question ?

Entre concentration touristique, sélection et sanctuarisation, quelles complémentarités ? Le développement du tourisme insulaire, opportunité ou aliénation ? Les sports de glisse, les grandes courses au large, la mer passion. Les croisières, la mer, mais où accoster ?




Mers et océans, traits d'union ou barrières ?

De l'Océanie à la mer Méditerranée, comment envisager des mers qui réunissent plus qu'elles n'isolent ? Tour du monde des océans et des mers...




Espagne : faits et réalités

L'Espagne s'est très fortement transformée au cours de ces dernières années. Elle s'est enrichie et son développement économique si rapide a, jusqu'à la crise de 2008, forcé l'admiration. Les évolutions sociétales mais aussi ses paysages tant urbains que ruraux, témoignent de l'importance, parfois de la brutalité, de ces mutations. S'appuyant notamment sur ce bilan économique et sur la puissance universelle de sa langue, l'Espagne en a profité pour revendiquer une nouvelle place dans les affaires du monde. La crise s'annonce sévère ; n'est-elle que le prélude à l'enterrement d'une paranthèse de croissance économique ou alors est-ce aussi le moment pour les Espagnols d'interroger en profondeur la nature de leur développement et de mettre à profit ce qu'il reste de cette croissance ? Répondre à ces questions difficiles implique d'introduire dans le débat une autre temporalité où il s'agit d'envisager sur un temps plus long le rapport de ce pays avec la modernité.


"Comment on prend une ville"


Voici un texte publié dans la revue de vulgarisation de la connaissance Science & Vie (n°1028 mai 2003). Si le texte date un peu, il fait référence à des auteurs incontournables en matière de réflexion sur la guerre urbaine (notamment l'historien Jean-L ouis Dufour auteur d'une synthèse sur les évolutions dans l'Histoire des liens entre ville et guerre : La guerre, la ville et le soldat paru en 2002 ; et le général Loup Francart, notamment auteur d'une réflexion stratégique sur la maîtrise de la violence dans les opérations extérieures : Maîtriser la violence : une option stratégique). L'article est à replacer dans son contexte, au moment du début de l'intervention étatsunienne en Irak et de la prise de Bagdad grâce à un arsenal technologique impressionnant, bien avant que le pays ne devienne le "bourbier" que l'on connaît aujourd'hui. Les principales problématiques sont posées dans cette présentation de la guerre urbaine : problèmes d'adaptation des matériels militaires, menace d'embuscades, difficulté à se maintenir dans la ville après la fin de l'opération militaire à proprement parler, difficultés liées à la trois dimensions imposées par les hauteurs des bâtiments et les réseaux souterrains... (Cliquez sur les 5 images pour obtenir le texte en plus grand format).



Source : Pierre Grumberg, "La ville, éternelle hantise des militaire", Science & Vie, n°1028, mai 2003, pp. 42-47.


mercredi 2 septembre 2009

Visa pour l'image 2009 : des webdocumentaires sur la guerre


Aujourd'hui est décerné le prix France 24/RFI récompensant un webdocumentaire, lors du festival Visa pour l'image 2009 à Perpignan. Parmi les webdocumentaires sélectionnés, plusieurs présentent des situations de guerre, pointant sur des situations différentes, et mettant en scène différents types d'acteurs vivant la guerre. Une sélection parmi cette sélection pour vous faire découvrir le travail de reporters dans des zones parfois oubliées de nos médias.



Bearing Witness : five years of Iraq war

Ce webdocumentaire (en anglais) proposé par Ayperi Karabuda Ecer et Jassim Ahmad revient sur la guerre en Irak et confronte différents points de vue à travers des récits, des témoignages, des portraits, des images, le tout accompagné de repères temporels (chronologie en images) et spatiaux (cartes de la répartition de la population, des ressources en pétrole...). Une bonne connection est nécessaire pour profiter de l'ensemble du webdocumentaire. Un très court extrait :



Etat : critique. Les mots de la guerre dans l'est du Congo

Ce webdocumentaire, de Cédric Gerbehaye, revient sur les populations déplacées lors de la guerre du Kivu (dans l'est de la République démocratique du Congo). Proposé en plusieurs langues, il propose une analyse de ces mobilités forcées dans un contexte de guerre civile, à travers un film (dont voici un court extrait), des témoignages, des blogs tenus par des membres de Médecins sans frontières proposant un retour sur leur expérience en RDC, de nombreuses photographies, ainsi que des archives.




On retrouvera également dans la sélection des webdocumentaires qui intéresseront tout amateur de géographie :
  • Adoma, vers la maison ?
    Le webdocumentaire proposé par Thierry Caron offre une visite originale d'un foyer Adoma proposant des logements (à l'origine destinés aux travailleurs migrants) pour accueillir ceux qui se trouvent dans des situations de grande précarité. La "visite" se fait en entrant directement dans le foyer, en choisissant de suivre les habitants de tel ou tel bloc.
  • Le corps incarcéré
    Un webdocumentaire de Philippe Janet qui propose une vision de la prison par ses "habitants", les détenus, selon un découpage en 5 chapitres, agrémentés de 3 interviews. A ce propos, on se reportera aux travaux du géographe Olivier Milhaud (qui prépare un doctorat sur l'espace carcéral envisageant la prison comme un imaginaire géographique).
  • The Iron Curtain diary (1989-2009)
    20 ans séparent la chute du Mur de Berlin et le début de la décomposition du rideau de fer et l'Europe d'aujourd'hui marquée par un élargissement de l'Union européenne et une redéfinition de la frontière entre les anciens ennemis. Le webdocumentaire d'Angelo Miotto propose des reportages sur différents points de cette ancienne frontière idéologique, qui entraîne dans une Europe en devenir entre permanences et mutations de la frontière.
  • La Maraude : à l'écoute des sans-abris
    Matthieu Mondolini et Pierre France proposent un webdocumentaire sur les sans-abris strasbourgeois, avec une immersion dans cet espace de la pauvreté que représente la rue pour ceux qui n'ont pas de toit.
  • Génération Tian'anmen. Avoir 20 ans en Chine
    Le webdocumentaire de Patrick Zachmann se propose de présenter la jeunesse chinoise, en 3 parties : les événements de Tian'anmen, l'interview de 2 Chinois et la place Tian'anmen aujourd'hui. Abordant des thèmes tels que la famille, la mémoire, la politique, l'identité, le webdocumentaire revient sur les permanences et les mutations de la société chinoise vues par sa jeunesse.
  • Chroniques de Pékin. De Mao aux JO
    Après un regard sociologique, Jonas Bendiksen s'intéresse lui aussi à la Chine et ses transformations, à travers un webdocumentaire qui se présente sous la forme d'une ballade dans la ville de Pékin, et met l'accent sur les héritages historiques et les mutations de la ville à travers 18 reportages-étapes.
  • The places we live
    Le dernier webdocumentaire de la sélection propose de suivre la vie de 16 familles vivant dans 4 bidonvilles de Caracas, Mumbai, Nairobi et Djakarta. A travers des photographies panoramiques, Jonas Bendiksen porte un regard sur les territoires de la pauvreté des grandes métropoles du Sud.


A noter également : la participation du CICR au Visa pour l'image avec une exposition reprenant des photographies de l'ouvrage L'Humanité en guerre. Plus d'informations sur le blog de Frédéric Joli (porte-parole du CICR en France) qui propose, notamment, depuis plusieurs mois de nombreuses interviews d'acteurs et de scientifiques sur la question de l'humanitaire dans les situations de guerre.