Les colloques de Cerisy proposent toujours des regards particulièrement innovants sur la recherche en lettres, et en sciences humaines et sociales : on pense notamment à la conférence sur "Logiques de l'espace, Esprit des lieux" en 2000 (dont les actes ont été publiés en 2000 aux Editions Belin, et constituent un ouvrage de référence pour comprendre le "tournant culturel" de la géographie), sur "Guerres et totalitarismes dans la bande dessinée" en 2006, ou sur la "Normandie sensible : regards croisés de géographes et de plasticiens" en 2009 (voir le programme). Le prochain colloque intéressera tous ceux qui se questionnent sur la ville : organisé par Franck Scherrer et Martin Vannier, le colloque "Villes et territoires réversibles" réunira des chercheurs de toutes disciplines touchant aux études urbaines (géographes, urbanistes, architectes, philosophes de l'urbain, sociologues, économistes...) et des responsables artistiques et politiques qui font face chaque jour aux aménagements urbains, du lundi 20 septembre au lundi 27 septembre 2010 au Centre Culturel International de Cerisy-la-Salle (Manche). Voir le programme et les résumés des interventions.
Présentation par les organisateurs :
Un des fondements de la pensée moderne quant à l’action collective fut, comme condition historique du progrès, de produire de l’irréversibilité. La ville du XXe siècle, sa société, ses mondes d’action collective, ont été profondément structurés, mais aussi profondément marqués, par ce goût démiurgique pour l’irréversible. On sait aujourd’hui ce qu’a permis de produire cette posture immodeste, mais aussi ce qu'il en a coûté, et continue d’en coûter.
On fait l’hypothèse que le nouveau fondement de la pensée post-moderne — ou hyper-moderne si l’on préfère échapper à ce débat — de l’action collective est dans la promotion du principe inverse : la réversibilité, comme nouvelle posture de la relation à un futur désormais largement désigné comme incertain. L’injonction au développement durable elle-même porte en germe une nouvelle utopie de la ville et du territoire réversible : comment agir de façon équitable sans avoir pour horizon la ville sans cesse inachevée afin de pas obérer les capacités des générations futures à conduire leur propre développement ?
La ville réversible au sein de territoires et de réseaux qui le seraient tout autant, les uns comme les autres par leurs acteurs, leurs systèmes d’action, leurs mondes techniques, leurs univers de production matérielle et idéelle ? De quoi peut-il bien s’agir ? D'où une seconde hypothèse : la réversibilité qualifie, dans les sociétés développées, la relation que l'on construit avec le futur de la même manière que le patrimoine est devenu le filtre hégémonique de notre relation avec le passé.
Ce colloque résolument interdisciplinaire se donne pour objectif de répondre à ces questions en explorant la réversibilité dans le nouveau système de valeurs, dans les formes concrètes, techniques, organisationnelles de son avènement, dans les cultures professionnelles qui la fondent progressivement comme une nouvelle modalité structurante de nos rapports à un temps moins linéaire, et à un espace plus modulable.
Prioritairement destiné aux urbanistes et aux aménageurs, mais ouvert également à tous ceux, chercheurs, enseignants, étudiants, responsables de collectivités, que ces enjeux retiennent, ce colloque souhaite organiser une large rencontre sur la question de la réversibilité, telle qu’elle a déjà été abordée dans d’autres mondes, techniques ou culturels, que celui de la ville (en particulier celui de la production industrielle et du management de l’entreprise), et telle qu’elle a déjà cheminé, aussi bien dans les problématiques scientifiques (notamment les sciences de la matière et les sciences de l’univers) que dans la création artistique (notamment dans le Land Art ou les arts de la rue).