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dimanche 29 août 2010

Les territoires de la criminalité en Russie (1) : quelques documents et quelques notes


Le prochain Festival International de Géographie (FIG), qui aura lieu du 4 au 7 octobre 2010 à Saint-Dié-des-Vosges (voir la présentation des différents parcours et animations ; le programme définitif sera communiqué au cours du mois de septembre sur le site de la ville de St-Dié), aura pour pays invité la Russie. L'occasion de présenter un nouveau blog accueilli sur la plate-forme Hypothèses et consacré aux différentes formes de violences en Russie : Comprendre les violences en Russie / Understanding violence in Russia. Rédigé en français et en anglais, il s'agit d'un carnet de recherches d'un groupe d'universitaires qui se proposent d'analyser les différentes formes de violences, au prisme des "guerres, systèmes politiques et trajectoires sociales". A suivre !

La criminalité est l'une des formes de violence, très souvent dénoncée dans les médias concernant la Russie. Pourtant, la criminalité est à la fois le fruit de réalités et de représentations, et parfois ces représentations servent les discours politiques : à ce titre, la thèse de géographie de Philippe Chassagne sur la criminalité dans les Balkans a démontré qu'il faut un énorme capital ressources pour que les trafics existent. De même, les chiffres officiels concernant les différentes formes de criminalité peuvent être une façon de légitimer des politiques publiques (par exemple, des lois contre l'immigration plus strictes, un renforcement des frontières, ou l'affirmation de la souveraineté de l'Etat-nation sur son territoire dans un contexte où il est fragilisé). Enfin, les discours sur la criminalité dans les différentes régions du monde sont aussi le fruit d'un imaginaire spatial construit. Cela ne veut pas dire qu'il faut sous-estimer la part de la criminalité dans la mondialisation, mais bien de prendre en compte les différents discours pour analyser plus finement les phénomènes criminels.


A lire sur ce blog :
- Le billet "Les trafics dans les villes en guerre : éléments de réflexion géographique" du 30 septembre 2008 ;
- Le billet "Le trafic de femmes dans les Balkans" du 8 mars 2009.

Des sites/blogs spécialisés :
- Geopium (Pierre-Arnaud Chouvy) ;
- Les mafias (Fabrice Rizzoli).

Quelques atlas :
- Fabrizio Maccaglia et Marie-Anne Matard-Bonucci, Atlas des mafias. Acteurs, trafics, et marchés de la criminalité organisée, Autrement, Paris, 2009 ;
- Observatoire géopolitique des drogues, Atlas mondial des drogues, PUF, Paris, 1996.




Les territoires de la criminalité en Russie


La Russie : le pays de tous les crimes ?

Toutes les formes de criminalité :
- Toutes les formes de crimes (armes, drogues, meurtres, blanchiment d'argent, cigarettes, matériel vidéo, matériel photographique, trafic de femmes, prostitution…)
- Toutes les formes d'organisations criminelles (petite délinquance, réseaux familiaux, réseaux criminels du type gangs, organisations mafieuses)


Définition des gangs :
- Dans les métropoles multimillionnaires, les gangs apparaissent comme des formes modernes de tribus ou de castes.
- Ils se caractérisent par une forte solidarité, venant compenser la dilution éventuelle des liens familiaux, ethniques ou sociaux.
- Ils se caractérisent aussi par leur territoire (quartiers) souvent délimité par des tags (inscriptions murales ayant valeur de bornes frontalières).
- Les gangs sont des acteurs incontournables de la vie des mégalopoles, et sont en lutte permanente entre eux, esquissant un découpage plus ou moins invisible de la cité.
- La transformation des gangs en groupes paramilitaires est une évolution possible en cas de conflit (ex : Sarajevo de 1992 à 1995).



Caractéristiques des organisations criminelles transnationales (OCT) :
- Leur activité est consacrée aux commerces illicites les plus lucratifs (drogue, jeux clandestins, industrie du sexe, usure…).
- Une partie des profits tirés de cette activité permet d'entretenir des systèmes de corruption des sphères privées et publiques.
- Elles disposent d'un puissant réseau possédant des ramifications internationales.
- L'importance des revenus qu'elles dégagent leur permet d'entretenir des moyens militaires et de communication importants, capables dans certains cas de menacer les pouvoirs centraux des Etats (ex : les cartels colombiens peuvent se prévaloir de flottes aériennes et maritimes et de moyens satellites qui leur permettent d'exercer un contrôle sur leurs réseaux à l'échelle planétaire).
- Leur activité se déroule en aval du commerce lui-même, dans l'investissement financier et le blanchiment de l'argent sale.
- Les organisations criminelles transnationales sont souvent liées aux guérillas locales qui contrôlent les zones de production de la drogue et forment en quelque sorte le réseau de distribution international en amont de la chaîne de production.

Caractéristiques des mafias :
- C'est une variété d'organisation criminelle transnationale que l'on caractérise essentiellement par son ancienneté (notamment l'ancienneté de ses rites initiatiques), ses structures féodales.
- Les mafias italiennes, les triades chinoises ou les Yakuzas japonais forment des sociétés séculaires dont l'histoire fait partie intégrante de celle de l'Italie (de la Sicile en particulier), de la Chine et du Japon.


Source : La cartothèque de Sciences Po.



Source : Claude CABANNE et Elena TCHISTIAKOVA, 2005, La Russie. Perspectives économiques et sociales, Armand Colin, collection U, 2ème édition (1ère édition 2002), Paris, p. 64.



Source : Michel NAVEZ, 2007, La Russie et ses marges : nouvel empire ?, Ellipses, collection CQFD, Paris, p. 78.



Source : Claude CABANNE et Elena TCHISTIAKOVA, 2005, La Russie. Perspectives économiques et sociales, Armand Colin, collection U, 2ème édition, Paris, p. 62.



Source : Roger BRUNET, Denis ECKERT et Vladimir KOLOSSOV, 1995, Atlas de la Russie et des pays proches, RECLUS/La Documentation française, Montpellier/Paris, collection Dynamiques du territoire, n°15, p. 155.


Source : Pascal MARCHAND, 2007, Géopolitique de la Russie, Ellipses, collection Géopolitique, Paris, pp. 102-105.





L'expansion territoriale et économique de la criminalité

Les facteurs permettant à la criminalité d'étendre son assise territoriale en Russie :
- Une situation privilégiée, à la croisée entre les zones de production (Asie centrale, Asie du Sud-Est, Russie elle-même) et les zones de consommation (Europe occidentale pour les drogues, femmes, cigarettes..., Afrique et Moyen-Orient pour les armes) ;
- L'existence d'un important capital-ressources inégalement réparti, favorisant certains oligarques ;
- La destruction du lien social à l'intérieur de l'Etat ;
- La marginalisation (économique et sociale) de certaines régions ;
- La paupérisation d'une grande partie de la population (entrée dans le capitalisme, perte des repères, arrivée du chômage dans le pays, arrivée de populations russes en provenance des Etats issus de la décomposition de l'URSS...) ;
- La volonté de s'enrichir pour une partie de la population (passeurs de drogue, fonctionnaires corrompus...).


Les réseaux criminels, de nouveaux acteurs géopolitiques
- La criminalité remet en cause la place de l'Etat dans le contrôle de l'espace et des ressources (qu'il s'agisse d'individus, de biens ou de services) ;
- Le problème est d'autant plus accru que la gestion d'un territoire si immense est un réel défi pour les autorités politiques nationales et locales, notamment autour de la question de la surveillance des frontières ;
- Depuis 1991, le crime organisé est sorti de son rôle marginal pour accéder au coeur de la société russe. Les organisations criminelles transnationales sont devenus des acteurs-clés de l'économie et de la société russes.


L'exemple de la drogue en Russie
- La Russie est à la fois une zone de transit et une zone de consommation des drogues, principalement en provenance d'Agfhanistan.
- Elle se retrouve au coeur d'une des routes des trafics de drogue à destination de l'Europe occidentale.
- Mais la perte de repères et le mal-être d'une partie de la société russe en font aussi une zone de consommation, notamment dans les grandes villes.


Source : Claude CABANNE et Elena TCHISTIAKOVA, 2005, La Russie. Perspectives économiques et sociales, Armand Colin, collection U, Paris, p. 65.



Source : Claude CABANNE et Elena TCHISTIAKOVA, 2005, La Russie. Perspectives économiques et sociales, Armand Colin, collection U, 2ème édition, Paris, p. 66.



Source : Alain LABROUSSE (dir.), 2003, Dictionnaire géopolitique des drogues, Editions de Boeck, Bruxelles, pp. 569-574.



Les épicentres de la criminalité

Deux types de hauts-lieux de la criminalité
- Les grandes villes, tout particulièrement Moscou,
- Les frontières.


Les villes
- Les villes constituent à la fois des plaques-tournantes des trafics (mettant en scène parfois plusieurs organisations criminelles qui "commercent" et échangent des marchandises illégales) et des lieux de "consommation" (prostitution, drogue...).
- Certains secteurs des villes sont sous le contrôle des gangs : chaque gang possède un quartier sur lequel il exerce un contrôle total. La ville se fragmente en plusieurs micro-territoires où réseaux criminels et autorités officielles entrent en concurrence pour le contrôle territorial.


Les frontières
- Elles "formatent" les routes de trafics ; pour faire entrer ou sortir des produits illicites, les organisations criminelles transnationales utilisent les "points faibles" des frontières.
- La longueur des frontières de la Russie explique la diffulté pour l'Etat de les contrôler dans leur totalité, mais aussi le besoin de coopération avec les pays voisins (par exemple, avec la Chine).



Transparent réalisé d'après  François GERE, 2002, Pourquoi les guerres ? Un siècle de géopolitique, Larousse/Courrier International, Paris, p. 144.


Source : Vladimir KOLOSSOV, 2006, "Les nouvelles frontières de la Russie et les perspectives de la coopération transfrontalière", dans J.-M. DECROLY et H. NICOLAÏ (dir.), 2006, Mutations des territoires dans le monde à l'aube du XXIe siècle, L'Harmattan, Paris, pp. 59-78.


  

Bibliographie sélective sur la criminalité en Russie :
- BRADSHAW, Michael, 2007, "Réflexion géographique sur l'abondance des matières premières", dans ECKERT, Denis, 2007, La Russie, Hachette supérieur, Collection recueils pour les concours, pp. 157-181.
- BRUNET, Roger, ECKERT, Denis, et KOLOSSOV, Vladimir, 1995, Atlas de la Russie et des pays proches, RECLUS/La Documentation française, Montpellier/Paris, collection Dynamiques du territoire, n°15, 208 p.
- CABANNE, Claude, et TCHISTIAKOVA, Elena, 2005, La Russie. Perspectives économiques et sociales, Armand Colin, collection U, 2ème édition (1ère édition 2002), 304 p.
- KOLOSSOV, Vladimir, 2006, "Les nouvelles frontières de la Russie et les perspectives de la coopération transfrontalière", dans DECROLY, J.-M., et NICOLAÏ, H., 2006, Mutations des territoires dans le monde à l'aube du XXIe siècle, L'Harmattan, Paris, pp. 59-78.
- LABROUSSE, Alain (dir.), 2003, Dictionnaire géopolitique des drogues, Editions de boeck, Bruxelles, pp. 569-574.
- MARCHAND, Pascal, 2007, Géopolitique de la Russie, Ellipses, collection Géopolitique, Paris, 619 p.
- MASSADA, 2003, "La corruption en Russie, hier, aujourd'hui et demain", Diploweb, Entretien avec Pierre Verluise, avril 2003.
- NAZET, Michel, 2007, La Russie et ses marges : nouvel empire ?, Ellipses, collection CQFD, Paris, 191 p.

UN RAPPEL : merci de citer les auteurs pour toute utilisation des documents proposés ici !

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