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vendredi 31 juillet 2009

Des articles en ligne sur le Liban et sur Beyrouth


Cette liste est, bien évidemment, loin d'être exhaustive : de nombreux chercheurs et centres de recherche s'intéressant à la question de Beyrouth et à celle du Liban, les ressources en ligne sur ces questions s'enrichissent mutuellement. Voici quelques liens pour trouver des articles scientifiques sur ces problématiques.



Le site de Georges Corm

Enseignant à l'Université Saint-Joseph de Beyrouth, ancien ministre des finances au Liban, Georges Corm propose sur son site personnel des liens vers certains de ses travaux. Spécialiste reconnu des questions libanaises et plus généralement moyen-orientales, ses analyses portent notamment sur la pertinence de la théorie du choc des civilisations, sur le sens et les conséquences de la communautarisation de la société face à la globalisation, sur l'idée d'un "retour du religieux", sur la place qu'occupe le Liban dans la région moyen-orientale...



Le site de Michael F. Davie

Professeur de géographie à l'Université de Tours, Michael F. Davie a travaillé sur les guerres du Liban, tout particulièrement sur la ville de Beyrouth. On peut retrouver certains de ces articles sur son site personnel. Egalement à lire une de ses interventions aux Cafés géo "Beyrouth à l’heure de la mondialisation : fragmentation des identités et des espaces" (24 avril 2008), son article "Les marqueurs de territoires idéologiques à Beyrouth (1975-1990)" paru dans L'Affiche Urbaine n°2 (1992), son intervention au colloquePetites villes et développement local dans le monde (1994) sur "Les banlieues de Beyrouth : espaces en crise", son intervention au séminaire Villes et territoires (1994) sur "Centres et centralités à Beyrouth (1850-1995)", et son intervention au colloque Villes en projet(s) (1995) sur "Discontinuités imposées au centre-ville : le projet de reconstruction de Beyrouth".



Les travaux d'Eric Verdeil

En plus de sa thèse soutenue en 2002 sur Une ville et ses urbanistes : Beyrouth en reconstruction, on peut retrouver les différents articles du géographe Eric Verdeil sur le site des archives ouvertes du CNRS, sur Beyrouth, le Liban et le Moyen-Orient. On y retrouve des articles sur les problématiques autour de la reconstruction de Beyrouth, sur les conséquences des guerres du Liban (notamment la guerre de l'été 2006), sur les enjeux géopolitiques de l'électricité au Liban et dans la région moyen-orientale, sur la géographie électorale au Liban...



Les travaux de l'Ifpo

L'Institut français du Proche-Orient (Ifpo) regroupe de nombreux chercheurs sur la question du Liban. Ils proposent de très nombreuses ressources en ligne, avec notamment la mise en ligne tous les articles de ses chercheurs dans les archives en ligne du CNRS (à ce jour 203 documents sont en ligne). De plus, depuis mai 2009, les Presses de l'Ifpo ont rejoint le site Revues.org pour offrir la mise en ligne de nombreux ouvrages très récents. Parmi eux, on notera l'excellent Atlas du Liban (2007) d'Eric Verdeil, Ghaleb Faour et Sébastien Velut (voir une note de lecture dans la revue Mappemonde) dont toutes les cartes sont mises à disposition, l'ouvrage dirigé par Frank Mermier Liban, espaces partagés et pratiques de rencontre (2008), et l'ouvrage d'urbanisme de Valérie Clerc-Huybrechts Les quartiers irréguliers de Beyrouth (2008).



Le dossier "Syrie-Liban" de la revue Mappemonde

La revue Mappemonde propose un dossier "Syrie-Liban" coordonné par les géographes Sébastien Velut et Eric Verdeil. On y retrouvera notamment des annalyses sur Beyrouth, avec les textes de Valérie Clerc-Huybrechts sur "Beyrouth: l’influence du foncier et des plans d’urbanisme sur la formation des quartiers irréguliers de la banlieue sud" (2006), et celui de Ghaleb Faour, Theodora Haddad, Sébastien Velut et Eric Verdeil sur "Beyrouth: quarante ans de croissance urbaine" (2005). D'autres articles portent sur les enjeux politiques et les conflits qui ont déchiré et déchirent toujours le Liban : "Cartographies du conflit israélo-libanais sur le web: bombardements et destructions" (Eric Verdeil, 2006), "La Bekaa (Liban): un espace géostratégique" (Karine Bennafla, 2006), "Entre Syrie et Israël: les cartes topographiques du Joulân-Golan, vecteurs de revendications territoriales" (Michael F. Davie, 2005), "Les territoires du vote au Liban " (Eric Verdeil, 2005), et "Récents litiges frontaliers entre Syrie et Liban" (Eric Verdeil, 2005).



Sur les autres revues de géographie

On retrouvera des articles sur le Liban sur Cybergéo avec l'article de Michael Davie et de Jean-Louis Drouot sur "la périphérie urbaine et les extensions de la ville de Beyrouth (Liban) : étude par traitement d'une image SPOT" (2007) et sur Echogéo avec l'article d'Agnès Deboulet et de Marie-Antoinette Hily sur "Les migrants de Beyrouth. Emplois à bon marché et zones refuges" (2009) et celui de Barah Mikail "De l’apparente perpétuité des blocages politiques libanais" (2007).

Egalement des articles sur Beyrouth dans le n°77-3 (2002) de la revue Géocarrefour : "Les espaces publics à Beyrouth" (Liliane Barakat et Henri Chamussy), ""Vous devriez venir le matin, il y a des gens biens, des sportifs !" Quand le sport habille les sociabilités publiques à Beyrouth" (Christine Delpal) et "La rue, espace réservé : voituriers et vigiles dans les nouvelles zones de loisirs à Beyrouth" (Tristan Kayat). Dans la même revue on retrouvera l'article de Karine Bennafla (disponible en ligne en janvier 2010, pour l'instant en accès payant) sur "Le développement au péril de la géopolitique : l’exemple de la plaine de la Békaa (Liban)" (2006).

Sur le site des Cafés géo, outre le café animé par Michael Davie signalé plus haut, on retrouvera également des réflexions proposées par Fabrice Balanche (chercheur à l'Ifpo et responsable de l'Observatoire urbain du Proche-Orient) : "Espace et pouvoir au Proche-Orient" (2006), "Espace et politique au Proche-Orient" (2007), "Le Liban, la triste réalité d'un Etat-tampon" (2007).

La récente revue L'Espace politique analyse de son côté la géographie électorale du Liban à travers un article sur "Le découpage électoral au Liban : une lecture géopolitique de la loi de 2000" d'Ali el Samad (2007).



La revue Villes et Territoires du Moyen-Orient

Cette récente revue, consacrée à la ville et à l'aménagement, s'intéresse spécifiquement aux pays moyen-orientaux. Parmi les articles sur le Liban, on retrouvera notamment "Le quartier d'Aïn Er Roummaneh à Beyrouth : l'identité est-elle géographiquement déterminée ?" (Mélanie Guillermo, 2007), "Le développement de la zone commerciale d’Al Buss : un désenclavement du camp de réfugié" (Kamel Doraï, 2007) et "Urbanisation et système confessionnel au Mont Liban" (Rola Chidiac, 2008).



La revue Cultures & Conflits

La revue Cultures & Conflits propose différents articles sur le Liban, parmi lesquels on notera "Guerre et drogue au Liban. Entretien avec Antoine Boustany" (Didier Bigo et Annie Laurent, 1991), "Anatomie d'un système de guerre interne : le cas du Liban" (Salim Nasr, 1990), et "Les habits neufs du communautarisme libanais" (Elisabeth Picard, 1994).



Le Liban : Etat des lieux d'un Etat-tampon (1ère partie)
Le Dessous des cartes - 23 novembre 2005


Le Liban : Etat des lieux d'un Etat-tampon (2ème partie)
Le Dessous des cartes - 30 novembre 2005



mardi 21 juillet 2009

Des atlas en ligne


Atlas Caraïbe


Panorama complet des différentes problématiques autour de cet espace sous tension proposé par une équipe nombreuse de géographes et de cartographes et accueilli par l'université de Caen, l'Atlas Caraïbe présente des cartes analysées regroupées par grandes thématiques (regards, économie, risques, formations supérieurs, statuts politiques, tourisme, population, santé, transports, technologies de l'information) ainsi que des propositions de séances pédagogiques utilisant ces cartes. La consultation du site est facilitée par les très nombreux liens dans les analyses renvoyant vers d'autres cartes qui permettent d'approfondir les points que l'on privilégiera. De nombreux autres articles complètent cet atlas particulièrement démonstratif (le pouvoir de la mer, Nord et Sud entremêlés, géopolitique de la Guyane...).

Les armées dans la Caraïbe



Zones franches, paradis fiscaux et économie souterraine :
un contexte régional favorable





Atlas Transmanche


La même Université de Caen met en ligne un Atlas Transmanche (également disponible en anglais). Conçu sur le modèle de présentation de la première version de l'Atlas Caraïbe et hébergé par l'université de Caen, cet atlas propose lui aussi des cartes commentées avec précision, dans lesquels on retrouve de nombreux liens vers les autres cartes analysées, le tout organisé autour de 8 grandes thématiques, elles-mêmes sous-divisées : transfrontalier, territoires, population, transport/accessibilité/logistique, environnement, aménagement/prospective, activités économiques, formation/recherche. Cet atlas offre de nombreuses perspectives pour tous ceux qui s'intéressent à la maritimité, à la question transfrontalière par le lien maritime, aux villes portuaires, au tourisme maritime, à la sécurité maritime...



Les dispositifs de surveillance en Manche





Atlas du Mercosur

"L’Atlas du Mercosur rassemble une série de cartes montrant l’organisation des territoires dans ce grand espace économique qui comprend l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et le Paraguay auxquels sont associés le Chili et la Bolivie. Par rapport aux représentations usuelles, généralement limitées à un seul pays, l’Atlas du Mercosur a l’ambition de montrer des phénomènes binationaux ou multinationaux, intéressant aussi bien les États dans leur intégralité que leurs villes ou leurs régions". Conçu par une équipe de géographes et de cartographes spécialisés dans l'étude des pays d'Amérique du Sud, cet atlas se présente en 4 parties : organisation, intégration, mondialisation et territoires dans lesquelles les auteurs démontrent l'intérêt de réfléchir aux organisations régionales non seulement en termes institutionnels, mais également au niveau de leurs conséquences sociospatiales (l'articulation entre espaces centraux / espaces d'articulation / espaces périphériques est, à ce titre, riche en réflexions sur les réussites et les échecs de l'intégration des territoires au sein du Mercosur).



La structure urbaine de la triple frontière de l'Iguazu




vendredi 17 juillet 2009

Le site du Collectif de Recherche International et de Débat sur la Guerre de 1914-1918


Le site du Collectif de Recherche International et de Débat sur la guerre de 1914-1918 (CRID 14-18) propose un nombre de ressources impressionnant pour tous les passionnés de la Première Guerre mondiale, depuis des articles scientifiques, des recensions d'ouvrages, un lexique, une filmographie, des propositions de sorties, des séances pédagogiques, des documents iconographiques, des ressources audio, des témoignages... Le CRID 14-18 est une association de chercheurs qui se donne pour objectif de faire progresser et de diffuser les connaissances sur la Première Guerre mondiale. Un site particulièrement riche !

vendredi 10 juillet 2009

Les Etats-Unis et la frontière : les murs, urbanisme de paix ou urbanisme de guerre ?


Peut-on confronter la politique d'immigration menée par les Etats-Unis pour empêcher le passage des immigrants clandestins sur leur territoire et la politique de sécurisation menée en Irak, tout particulièrement dans la ville de Bagdad ? Ces deux enjeux sécuritaires se rapprochent sur au moins un point : celui de l'utilisation du mur dans les enjeux sécuritaires. Les murs de séparation pour les Etats-Unis : un urbanisme de paix ou un urbanisme de guerre ?

Cette question s'est posée suite à un constat relativement simple : les Etats-Unis utilisent le mur de séparation comme réponse territoriale et politique à deux enjeux sécuritaires divers : un enjeu de sécurité intérieure (la matérialisation de la frontière Etats-Unis / Mexique) et un enjeu de sécurité extérieure (la sécurisation et la pacification de l'Irak, tout particulièrement de la capitale Bagdad qui concentre les enjeux politiques, symboliques et médiatiques). Les murs, une réponse uniforme aux insécurités (au pluriel) ?



Le mur Etats-Unis / Mexique

La question de la matérialisation de la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, à travers la construction d'un mur, a fait coulé beaucoup d'encre parmi les journalistes. Le tracé de la frontière actuel a fait l'objet de nombreuses disputes territoriales au XIXe siècle, et ne s'est stabilisé qu'après 1853 (voir l'historique de cette frontière proposé par Fabien Guillot sur son site "Géographie sociale et politique"). Pour Michel Foucher, géographe spécialiste de la question des frontières, "Tracer une frontière est un acte géopolitique par excellence puisqu’il s’agit de délimiter des aires d’exercice de la souveraineté, d’inscrire le politique dans l’espace" (Frontières à retracer : un point de vue de géopoliticien", Frontières et limites, acte de séminaire, Centre Georges Pompidou, Paris, 1991, p. 69). De ce fait, la matérialisation de la frontière ne peut être vue comme une seule politique de sécurité : elle est aussi un symbole très fort pour les populations qui se retrouvent des deux côtés de ce mur-frontière.

Ainsi, la matérialisation de la frontière est un important marqueur spatial de la souveraineté d'un Etat sur son territoire. L'enjeu n'est pas seulement migratoire, il est également symbolique et politique. D'une part, contrôler son propre territoire estun des enjeux de la puissance d'un Etat, d'autant plus fondamental à l'heure d'une forte médiatisation de tous les recoins de la planète, pour un pays comme les Etats-Unis confronté à la recherche du maintien de leur puissance hégémonique. D'autre part, contrôler son propre territoire est également un enjeu politique intérieur, tout particulièrement dans les périodes électorales. Le thème de la sécurité est plus que jamais ancré dans les discours politiques : d'une part, la part de "l'Autre" a toujours marqué l'histoire des hommes, à la fois pour des thèses culturalistes (cet "Autre" aux moeurs et à la culture différentes) et pour des thèses malthusiennes (un afflux massif de populations ne pourra être absorbé, notamment face au manque de ressources qu'il engendrera). Il ne s'agit pas de discuter les bien-fondés et les fantasmes qui formatent ces peurs, mais de constater qu'elles engendrent des représentations particulières (avec un rejet marqué d'un "Autre" mal défini), qui elles-mêmes apppelent des réponses politiques (notamment au gré des enjeux électoraux). Force est de constater que la matérialisation de la frontière Etats-Unis/Mexique correspond à une "demande" en termes de sécurisation du territoire. Demande d'ailleurs précédée d'actions "associatives" (du fait de l'omniprésence de milices privées qui se sont auto-désignées pour assurer la surveillance de la frontière), qui montrent combien la peur d'une perte de souveraineté étatique et de contrôle territorial influence les représentations, et même les actions des habitants proches de la frontière Etats-Unis/Mexique. La matérialisation de la frontière a donc été précédée par une construction mentale (celle d'un "mur perçu", si l'on se réfère au concept de "frontière perçue" et de "frontière vécue") qui s'ancrait dans la société du Sud des Etats-Unis et s'inscrivait dans les pratiques spatiales. Du côté états-unien, le mur a donc été dans les têtes, avant d'être matérialisé. Du côté mexicain, la présence de milices privées a également marqué de longue date (bien avant la construction d'un mur) l'impossibilité ou du moins l'interdiction de passer la frontière illégalement : la frontière était déjà un territoire du danger pour tous les immigrés clandestins. Par conséquent, avant la matérialisation du mur, la frontière Etats-Unis se construisait déjà comme un mur-frontière, tant dans les représentations, dans les discours politiques que dans les pratiques spatiales.


A lire sur le mur-frontière entre les Etats-Unis et le Mexique :



Les murs de séparation à Bagdad

Autre forme d'insécurité à laquelle sont confrontés les Etats-Unis, par le biais de leur intervention militaire menée en Irak : le maintien de l'ordre dans une opération militaire. Les murs de séparation sont dotés de plusieurs objectifs : stabiliser la situation entre les communautés qui s'opposent ; empêcher les acteurs déstabilisateurs d'opérer des exactions dans les territoires appropriés par l'autre groupe (quelque soit la façon dont les groupes se définissent en tant qu'ennemi dans une guerre larvée : différenciation politique, sociale, identitaire...) ; permettre aux militaires déployés à Bagdad d'établir des points de contrôle pour canaliser les déplacements urbains... Il s'agit là de la matérialisation de lignes de fracture intraurbaines, c'est-à-dire de frontières mentales qui marquent de fortes ségrégations dans l'organisation structurelle de la ville (et ce bien avant la guerre, qui a été un accélérateur de ces processus de différenciation et de regroupement communautaires).

Pourtant, les murs à Bagdad, comme tant d'autres, sont éphémères : "les frontières étanches n'ont jamais existé"("A bas les murs !", Cafés géo, 4 février 2008). Et les murs appelent également à de nouvelles territorialités entre enfermement (symbolisé par le seuil qu'il faut franchir, avec autorisation, pour pénétrer dans l'autre territoire) et transgression de l'interdit. Que ce soit par l'enclavement du territoire approprié ou par les flux transgressant cet enclavement, le mur laisse des stigmates dans les pratiques spatiales et la configuartion de l'espace socioculturel (voir le billet "La guerre, la ville et le mur" du 22 janvier 2009).


A lire sur le cas des murs de séparation à Bagdad :




L'obsession des murs ?

En détournant le titre de l'ouvrage du géographe Michel Foucher L'obsession des frontières, on peut revenir au questionnement à l'origine de ce billet : aux Etats-Unis, y a-t-il une obsession des murs comme réponse aux insécurités sous des formes diverses ? Bien évidemment, on ne retrouve pas cette utilisation du mur et du barbelé comme outil sécuritaire aux seuls Etats-Unis (les murs en Israël-Palestine, les peacelines de Belfast, la ligne verte de Chypre, la frontière Liban/Israël...) : il s'agit ici de discuter un cas, mais l'étude mériterait d'être approfondie. Que ce soit dans le cas d'une séparation interétatique ou d'une séparation intra-urbaine, le mur a pour fonction de matérialiser la séparation, d'inscrire dans les paysages le cloisonnement des territoires, et de restreindre les pratiques spatiales en imposant un seuil entre deux territoires, qui ne peut être franchi sans autorisation. A l'heure de la globalisation, on assiste à un "retour" de la frontière, et tout particulièrement de la frontière matérialisée. Dans ce cas, le barbelé et le mur sont fortement chargés de symboles : celui d'un entre-soi extrême et d'un enfermement recherché ou imposé. Ainsi, par la barrière, il y a appropriation de la discontinuité entre deux territoires (que ce soient deux Etats, deux quartiers...).

Il est intéressant également de s'arrêter sur les discours qui entourent la construction des murs, et qui dépendent avant tout de l'utilisateur : concerné directement ou non ? D'une part, les murs semblent répondre à des demandes en termes de sécurisation de la part de certains habitants : la zone qui correspond à la juxtaposition entre deux territoires identifiés comme différents (deux Etats, deux territoires communautaires) est représentée comme une zone floue et dangereuse par les habitants. La proximité entre deux populations qui s'identifient nettement comme différentes n'est donc pas recherchée, voire même le plus brutalement rejetée, parce qu'elle est assimilée à une forte insécurité. C'est le cas de la frontière Etats-Unis/Mexique du point de vue des habitants états-uniens. Le point de vue des Mexicains est différent, puisqu'il s'agit pour eux de contrer l'effet positif de la frontière (avec le système de maquiladoras, qui apportent de nombreux emplois dans le Nord du Mexique) en le transformant en grande partie en effet-barrière. D'autre part, les discours des "observateurs", c'est-à-dire de ceux qui ne sont pas concernés par ces murs dans leurs territoires du quotidien et portent un regard extérieur. Il n'est pas rare de voir des commentaires sur les "murs de la honte" que ce soit pour parler de la frontière Etats-Unis/Mexique, des murs de séparation à Bagdad ou de tout autre mur dans le monde. Ce regard condamne la fin de la proximité, et ainsi l'impossibilité d'un multiculturalisme dans toutes les zones concernées par les murs. Ces observateurs s'interrogent sur la légitimité à matérialiser la séparation, la division, les discordes intercommunautaires.

De ce fait, le regard porter sur les murs-frontières dépend de qui pose ce regard, des intentionnalités des acteurs, de la situation politico-économique... mais également de leur vision du monde et du rôle même de la frontière dans leur espace socioculturel : la frontière est-elle un blocage ou une sécurité ? Se construit-elle en opposition aux modes d'habiter l'espace ou est-elle une légitimation de l'espace approprié ? Dans leur ouvrage Les frontières mondiales. Origines et dynamiques, Patrick Picouet et Jean-Pierre Renard donnent des exemples particulièrement illustratifs de cette représentation différenciée de la frontière en fonction du rôle que les hommes lui attribuent : "si elle est très visible sur la carte, remarquable par sa linéarité et régularité, la frontière est en revanche, parfois beaucoup plus floue dans l'espace vécu des populations. S. Lima [Stéphanie Lima, 2003, Découpage entre espace et territoire : la fin des limites ? La fin des territoires communaux dans la région de Kayes, Mali, thèse, Université de Poitiers, 532 p. + annexes] démontre que les sociétés rurales africaines continuent de fonctionner en réseau plutôt qu'à l'intérieur de territoires finement délimités. Alors qu'un nouveau maillage communal intérieur est en cours d'élaboration dans la région de Kayes (Mali), les sociétés rurales considèrent ces nouvelles lignes-frontières comme des contraintes, des limites "appauvrissantes". Fondamentalement, l'espace vécu des populations s'inscrit dans la mobilité et les échanges ; une limite nette, tranchée, divise, sépare et appauvrit les sociétés. Telle est la représentation de ces sociétés, non imprégnées historiquement, d'une organisation socio-spatiale aussi cloisonnée et rigide que la nôtre. En France, culturellement, le territoire se conçoit à partir d'un espace approprié et délimité ; au Mali, le territoire est un espace de mobilité, d'échanges, de négociations aux limites souvent floues." (Editions du Temps, collection Une géographie, Paris, pp. 72-73). On peut se demander si le fait d'envisager le mur comme moyen de sécurisation d'un territoire ne provient pas seulement de moyens techniques, mais également de la vision qu'entretiennent les acteurs de la construction du mur vis-à-vis du rôle de la frontière.

Le mur se construit comme une réponse à un "ennemi" perçu, qu'il soit n "ennemi" extérieur (à travers le bétonnage des frontières interétatiques, que ce soit entre les Etats-Unis et le Mexique, ou dans les enclaves européennes de Ceuta et Melilla) ou un "ennemi" intérieur. En ce sens, le mur n'est pas seulement un outil sécuritaire (dans le sens où il n'a pas pour seul but une efficacité vis-à-vis des objectifs sécuritaires qu'on lui attribue), il est également (et avant tout ?) la matérialisation d'un discours politique centré sur les enjeux sécuritaires. "Urbanisme de paix" ou "urbanisme de guerre" : la différence entre les deux conceptions accordées aux mêmes murs par des acteurs différents ne vient-elle pas de la représentation du mur comme outil sécuritaire ou outil de division ? Et derrière, se pose la question de la séparation des groupes d'hommes comme moyen de pacifier une ville, un Etat, une région... Derrière les représentations, se posent de multiples questions quant aux modalités d'intervention d'une force militaire avec ses propres représentations dans une zone où elle doit d'abord apprendre à connaître et comprendre les représentations des habitants.



A lire et à voir :



Quelques livres récents :

  • Michel Foucher, 2007, L'obsession des frontières, Editions Perrin, 250 p.
  • Alexandra Novosseloff et Frank Neisse, 2007, Des murs entre les hommes, La documentation française, Paris, 212 p.
  • Patrick Picouet et Jean-Pierre Renard, 2007, Les frontières mondiales. Origines et dynamiques, Editions du Temps, collection Une géographie, Paris, 160 p.


Nouveaux murs
Emission du Dessous des cartes du 8 mars 2007




mardi 7 juillet 2009

La géographie en blogs, en vidéos et en podcast


Ces jours-ci, l'activité du blog est nettement ralentie, en cette période de rédaction de thèse. En attendant une reprise plus active, voici les liens vers les différents blogs de géographie de François Arnal (professeur de géographie en classe préparatoire au Lycée Claude Fauriel Saint-Etienne), consacrés aux classes préparatoires, mais qui peuvent intéresser un public bien plus large.

Conçu comme un complément des cours qu'il donnait à l'Université de Saint-Etienne, le blog est désormais principalement axé sur les questions aux programmes des classes préparatoires. Mais pas seulement... Analyse géographique de films (complément utile aux analyses proposées par les Cafés géo), analyses de paysages, présentation de concepts-clefs de la géographie... Le blog est régulièrement enrichi par des analyses pertinentes et stimulantes.

Ce blog réunit des émissions de radio sur des thèmes étudiés en classes prapratoires, depuis la géographie de la France jusqu'au thème annuel pour les 2èmes années. Le blog ne semble plus actualisé, mais les émissions sélectionnées valent le coup d'oeil (ou plutôt d'oreille). Comme l'annonce François Arnal : "la géographie, ça s'écoute aussi..." L'émission Planète Terre proposée chaque mercredi sur France Culture est là pour nous en rappeler l'intérêt !

Hébergé par le site Curiosphère qui propose de très nombreuses vidéos à usage pédagogique, ce second blog se propose d'explorer l'univers des vidéos, autour des questions au programme de classes préparatoires. L'an dernier, la question portait sur "Santé et environnement". On y retrouve également des vidéos sur des concepts de la géographie.


dimanche 5 juillet 2009

Colloque "L'Europe, le monde et l'alimentation"


Conseillée par les Cafés géo , la 15ème université d'été de l'innovation rurale aura pour thème "L’Europe et le Monde. De crises en déprises.... L’alimentation à couteaux tirés" (des 5, 6 et 7 août 2009, aux Controverses de Marciac, dans le Gers), intéressera sans aucun doute tous ceux qui se questionnent sur les risques alimentaires, en tant que réalité, mais également en tant que discours. En voici le programme. Pour s'inscrire, téléchargez le formulaire. Voici la présentation faite par les organisateurs (avec de nombreux liens vers des analyses sur la question alimentaire) :



A l’échelle du Monde, la sécurité alimentaire et les équilibres nutritionnels, déjà fragiles, subissent de plein fouet l’actuelle crise financière et économique, ainsi que l’ont dramatiquement révélé, en 2008, les émeutes de la faim dans près d’une quarantaine de pays. Fait nouveau, les pays industrialisés connaissent eux aussi d’inquiétants phénomènes de malnutrition.A qui la faute ? Comment y voir clair dans les arguments avancés ici et là ? Que faut-il faire et à quelles échelles peut-on agir au plus vite ? Un rendez-vous exceptionnel ouvert à tous (agriculteurs, citoyens, associatifs, enseignants, chercheurs, élus...)au coeur du Gers et du festival Jazz In Marciac, avec notamment Edgard Pisani, Pierre Moscovici, Philippe Chalmin, Bertrand Hervieu, et de nombreuses personnalités étrangères. Organisé par la Mission Agrobiosciences et la Communauté de Communes "Bastides et Vallons du Gers".


Un lieu unique d’échanges et de réflexion collective
Entre sous-nutrition et obésité, ce début du 21ème siècle laisse comme une crampe à l’estomac. Inadaptation de l’offre, production insuffisante, carences des mécanismes de régulation, concurrence des agrocarburants, déséquilibres en termes d’accès aux denrées, diminution des ressources naturelles, déstructuration des agricultures locales... Les controverses se multiplient pour désigner les inconciliables, les coupables, les pas capables. Autant d’aspects que souhaite éclairer et mettre en débat ces Controverses de Marciac, organisées par la Mission Agrobiosciences et la Communauté de Communes Bastides et Vallons du Gers. Un lieu unique en France pour confronter, durant trois jours, les points de vue des meilleurs spécialistes français étrangers, non pas conçu sous la forme d’un colloque restreint entre "experts", mais pensé comme un moment d’échanges et de construction collective entre agriculteurs, citoyens, responsables associatifs, industriels, chercheurs, enseignants, élus et pouvoirs publics... En présence de Martin Malvy, ancien ministre, Président de la Région Midi-Pyrénées.


Mercredi 5 août 2009 : Entre pénuries et abondances
LE MATIN : 10h00-13h00
  • Ouverture Jean-Claude Flamant, Président de la Mission Agrobiosciences.
  • Crise financière, crise alimentaire : le retour du protectionnisme ? Par Jean-Luc Gréau, économiste, auteur notamment de "La Trahison des économistes" (Ed.Gallimard, 2008) et de "L’avenir du capitalisme" (Gallimard, 2005).
  • Radiographie d’une crise alimentaire mondiale Par Philippe Chalmin, Professeur d’histoire économique à l’université Paris-Dauphine. Auteur de "Le Monde a faim" aux Editions Bourin (2009).
  • Petite histoire de la faim Par Jean-Luc Mayaud, Professeur d’histoire contemporaine, Université de Lyon 2 Louis Lumière.
  • Regard prospectif sur la crise économique actuelle et la sécurité alimentaire Par Lucien Bourgeois, économiste, membre du Conseil Economique et Social.
  • « A la recherche des équilibres perdus » A l’heure des inégalités sociales, sanitaires et alimentaires, a-t-on déjà connu l’équilibre ?Avec Jean-Louis Rastoin, économiste, Professeur à Supagro Montpellier. Directeur de l’UMR « Marchés, organisations, institutions et stratégies d’acteurs » (Moïsa).
  • Relecture de la matinée, sous l’angle de la malnutrition Yves Martin-Prével, épidémiologiste, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement (IRD) dans l’Unité Mixte de Recherche NUTRIPASS « Prévention des malnutritions et de pathologies associées ».

Débat avec la salle.
Déjeuner

L’APRES-MIDI : 15h00-18h00 : Quatre Controverses

  • Les agrocarburants coupables des crises de la faim ? Aurélie Trouvé, Docteur en sciences économiques, co-présidente d’Attac France Et Pierre Cuypers, Président de la Chambre d’Agriculture de Seine-et-Marne, Président de l’association nationale pour le développement des carburants agricoles (ADECA)
  • Moins consommer de viande : une injonction de riche ? Dialogue entre Jean-Marie Guilloux, Mission Agrobiosciences et Patrick Denoux, Professeur de psychologie interculturelle, Université Jules Verne (Amiens).
  • A-t-on vraiment besoin des OGM pour nourrir le Monde ? Marion Desquilbet, économiste INRA, Ecole d’Economie de Toulouse
  • Malthus avait-il raison : sommes-nous trop nombreux sur la planète ? Par Jean-Marc Boussard, agronome et économiste INRA, ESR MONA.

Intervention-réaction de Guy Paillotin, , Secrétaire perpétuel de l’Académie d’agriculture de France, ancien président de l’Inra

Ponctuation Par Marc Gauchée, essayiste

Débat avec la salle

La Dimension culturelle de la crise Par Patrick Denoux, Professeur de psychologie interculturelle. Université Jules Verne. Amiens

Relecture de la journée ,Par Edgard Pisani, ancien Ministre de l’Agriculture ; ancien Commissaire européen.


Jeudi 6 Août 2009 : Quelles protections face à la crise ?
LE MATIN : 10h00-13h00

  • Relance à partir des débats de la veille Par Gilles Fumey, géographe, enseignant à l’Université Paris IV Sorbonne, animateur du réseau des cafés géographiques, auteur de « Géopolitique de l’alimentation » (Ed. Sciences Humaines, 2008)
  • Quatre forums d’échanges autour des controverses de la veille, avec l’ensemble des participants.
  • Restitutions des forums par Aurélie Trouvé ; Pierre Cuypers ; Patrick Denoux ; Marion Desquilbet ; Jean-Marc Boussard.
  • Réactions de la salle
  • Ponctuation Par Marc Gauchée, essayiste

Déjeuner


L’APRES-MIDI : 15h00-18h00

  • Industries, distributeurs, ONG... Les régulateurs privés en questions. Gilles Allaire, économiste, directeur de recherche Inra
  • Les limites d’un nouveau modèle de gouvernance Nord/Sud. Eve Fouilleux, chercheur en sciences politiques au Cnrs (Centre d’Etudes Politiques de l’Europe Latine) et chercheur associée au Cirad.
  • Intervention-réaction d’Henry Rouillé d’Orfeuil, CIRAD, ancien Président de Coordination SUD, Coordination nationale des ONG françaises de solidarité internationale.
  • Débat
  • Réaction et débat entre quatre personnalités européennes Jan Mulder, député européen Pays-Bas ; Stéphane Le Foll, député européen France ; Jean-Luc Bennhamias, député européen France ; Marie-Hélène Aubert, ex-députée européen France.
  • Grand témoin tout au long de la journée Martin Malvy, ancien Ministre, Président de la Région Midi-Pyrénées
  • Apéritif. Jumelage des Controverses de Marciac (France) avec la Magyar Agrarakadémia (Hongrie). Par István Fehér, ancien Secrétaire d’Etat à l’Agriculture et au développement rural (Hongrie), et Csaba Tabajdi(sous réserve), Député Européen et ancien Secrétaire d’Etat à l’Agriculture (Hongrie)

Vendredi 7 Août 2009 : Tabler sur le politique ?
LE MATIN : 10h00-13h00

  • Grands Témoins relanceurs « Quelles questions posées au politique et au débat public en regard de ces deux journées ? », Par Bertrand Hervieu, sociologue, Secrétaire général du Centre International des Hautes Etudes Agronomiques Méditerranéennes Alberto Massot-Marti, Direction générale des Etudes, Commission Agriculture du Parlement Européen. Et Tomas Garcia Azcarate, chef d’Unité à la DG Agri, Commission européenne.
  • Vu de la Hongrie Par István Fehér, ancien Secrétaire d’Etat à l’Agriculture et au développement rural, et Csaba Tabajdi (sous réserve), Député Européen et ancien Secrétaire d’Etat à l’Agriculture.
  • Vu des Pays-Bas Par Jan Mulder, député européen Pays-Bas
  • Vu de l’Allemagne Par Martin Nissen, Premier Conseiller de l’Ambassade d’Allemagne à Paris, délégué aux Affaires agricoles et Protection des consommateurs.
  • Vu de la France Par Philippe Martin, député, Président du Conseil Général du Gers (pressenti).
  • Vu de Belgique Par Marc Tarabella, ministre belge de la jeunesse, de l’enseignement de promotion sociale et de la formation (sous réserve).
  • Grands Témoins conclusifs Pierre Moscovici, Député du Doubs, ancien ministre délégué aux Affaires Européennes, ancien Député européen. Hervé Lejeune, Sous-directeur général de la FAO (sous réserve)Michel Barnier, Ministre de l’Agriculture et de la Pêche (sous réserve).
  • Déjeuner


L’APRES-MIDI : 15h00-16h00
La Conversation. Retour sur ces controverses et pistes de sujets pour 2010.